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Psychologie

Le Désengagement Moral : le Comprendre et en Reconnaître les Mécanismes

Comment des individus ordinaires justifient des comportements contraires à l’éthique sans éprouver de culpabilité ?

L’affaire de Mazan, ce viol collectif organisé pendant dix ans par le mari d’une victime sous sédation, a été l’objet d’une immense vague médiatique. L’un des aspects les plus frappants de ce crime hors-norme est que les agesseurs n’étaient, pour la plupart, ni des monstres, ni des marginaux, mais plutôt des pères de famille souuvent bien insérés dans la société. Comment des gens normaux ont-ils pu continuer à vivre sans remord après de tels actes, voire les perpétrer à plusieurs reprises ?

Pour expliquer une telle attitude, le psychologue Albert Bandura a développé le concept de désengagement moral. Celui-ci décrit les processus par lesquels les individus justifient des comportements contraires à leurs valeurs morales sans ressentir de culpabilité. Ces mécanismes permettent de rationaliser des actions nuisibles et de maintenir une image de soi positive malgré des comportements éthiquement inacceptables.

Histoire du Concept

Bandura introduisit le concept de désengagement moral dans les années 1980. Le chercheur, connu pour sa théorie socio-cognitive de l’apprentissage social, a exploré comment les individus peuvent apprendre des comportements par l’observation et l’imitation. Il a ensuite étendu cette théorie pour inclure les mécanismes par lesquels les gens s’absolvent des sanctions morales de leurs actions, permettant ainsi des comportements nuisibles sans remords.

Mécanismes du Désengagement Moral

Le désengagement moral est l’ensemble de mécanismes cognitifs qui désactivent l’autorégulation morale. Il permet de prendre des décisions contraires à l’éthique sans culpabilité. Il opère de plusieurs façons :

  • Justification morale : Les individus présentent leurs actions nuisibles au service d’un but positif. Par exemple, la violence est nécessaire pour maintenir l’ordre ou protéger des valeurs importantes.
  • Utilisation d’un langage euphémique : L’emploi de termes neutres pour décrire des actions répréhensibles les adoucit. Par exemple, dire « dommages collatéraux » au lieu de « morts civiles » minimise l’impact perçu des actions. Ou encore le « traitement » terme employé pendant la Seconde Guerre Mondiale pour désigner l’extermination des Juifs d’Europe
  • Comparaison avantageuse : Comparer ses propres actions à des comportements bien pires pour les rendre plus acceptables. Par exemple, un employé qui vole de petites sommes d’argent peut se justifier en se comparant à des criminels de grande envergure.
  • Déplacement de responsabilité : Les individus se déchargent de la responsabilité de leurs actions en la transférant à une autorité supérieure ou à des circonstances extérieures. Par exemple, Adolf Eichmann a prétendu lors de son procès qu’il ne faisait qu’obéir aux ordres.
  • Diffusion de responsabilité : Lorsque la responsabilité est partagée entre plusieurs personnes, chaque individu se sent moins coupable. Par exemple, dans un groupe, chacun peut penser que les autres sont responsables.
  • Distorsion ou minimisation des conséquences : Les individus ignorent ou minimisent les effets négatifs de leurs actions. Par exemple, un pollueur peut minimiser l’impact environnemental de ses activités.
  • Déshumanisation : Les victimes sont perçues comme moins humaines ou moins dignes de considération morale. Par exemple, en temps de guerre, l’ennemi peut être décrit comme une menace déshumanisée.
  • Attribution de blâme : Les individus blâment les victimes pour les actions subies. Par exemple, un agresseur peut prétendre que la victime a provoqué l’agression.
antécédents et conséquences

Des travaux de recherche, en particulier ceux menés par Detert sur des étudiants de Cornell University, ont montré que plus la personne se désengageait moralement, plus elle commettait des actions contraires à l’éthique (par exemple tricher aux examens). Les mêmes travaux ont montré que moins une personne est empathique, plus elle a tendance a se désengager moralement. De même, plus elle éprouve de ressentiment ou moins elle fait confiance aux autres.

Exemples Historiques

Dans son ouvrage “Moral Disengagement”, Bandura présente plusieurs domaines d’application de sa théorie :

  • Les médias : en particulier comment la violence à la télévision impacte les spectateurs
  • L’industrie des armes aux Etats-Unis : comment les pro-armes justifient la défense de leurs droits
  • Le monde de l’entreprise : sur la manière qu’ont certaines entreprises de prendre des décisions contraires à l’éthique
  • Le terrorisme : comment les groupes terroristes justifient leurs attentats
  • La protection de l’environnement : sur la façon de justifier les comportements qui portent atteinte à l’environnement

Le scandale Enron est un exemple classique de désengagement moral dans le monde des affaires. Enron, une entreprise américaine du secteur de l’énergie, a commis une fraude comptable massive au début des années 2000. Les dirigeants de l’entreprise ont utilisé plusieurs mécanismes de désengagement moral pour justifier leurs actions en particulier:

  • Justification morale : Ils ont présenté leurs actions comme nécessaires pour maintenir la compétitivité de l’entreprise.
  • Langage euphémique : Des termes comme « optimisation fiscale » ont été utilisés pour adoucir la réalité de la fraude.
  • Diffusion de responsabilité : La responsabilité a été partagée entre de nombreux cadres (cabinets d’avocat, experts-comptables), réduisant le sentiment de culpabilité individuel.

Le scandale a finalement conduit à la faillite de l’entreprise et à des réformes majeures dans la réglementation financière.

Conclusion

Le désengagement moral est un mécanisme puissant qui permet aux individus de rationaliser des comportements nuisibles. En comprenant ces mécanismes, nous pouvons mieux les reconnaître en nous-mêmes et chez les autres, et travailler à les contrer pour favoriser un comportement plus éthique et responsable.

Lors d’un prochain article, nous analyserons comment cette théorie s’applique aux crimes perpétrés à Mazan.

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Insertion professionnelle

Les Réalisations Probantes : Un Outil Clé pour Valoriser Vos Compétences

Les réalisations probantes, preuves tangibles de vos compétences, sont essentielles pour renforcer votre crédibilité dans le cadre de votre carrière

Les réalisations probantes (RP) sont des preuves tangibles de vos compétences et de vos succès professionnels. Grâce à elles, vous démontrez votre valeur ajoutée, que ce soit pour une candidature à un poste, une promotion ou une évaluation de performance.

Mais qu’est-ce qu’une réalisation probante, à quoi sert-elle et comment la produire ? Pour cela, cet article explore ces questions et propose un exemple concret pour illustrer le concept.

Qu’est-ce qu’une réalisation probante ?

Aujourd’hui un recruteur ne demande pas à un candidat de citer ses compétences mais de les prouver en les illustrant. Savoir démontrer nos compétences en racontant comment nous les mettons en œuvre est un plus face à un recruteur. Les RP sont des pièces destinées à décrire son parcours professionnel comme une histoire positive et convaincante. C’est un des éléments-clé de la méthode AVARAP.

Une RP apporte la preuve concrète de votre capacité à atteindre des résultats significatifs dans votre domaine professionnel. Elle consiste notamment en des missions ou actions réalisées dans votre vie professionnelle ou personnelle, ayant produit des résultats dont vous êtes fier. Elle peut ainsi prendre la forme de projets réussis, de rapports d’analyse, de stratégies mises en œuvre, ou de toute autre contribution mesurable et vérifiable.

À quoi sert une réalisation probante ?

En faisant l’inventaire de ses RP, une personne en recherche d’emploi engrange plusieurs bénéfices :

  • Reprendre confiance en soi : En identifiant et en prenant conscience de ses succès, elle renforce son estime personnelle.
  • Démontrer ses compétences : Elles montrent ses compétences en action, au-delà des simples affirmations sur un CV ou une lettre de motivation
  • Préparer son projet professionnel : Les RP l’aident à définir ses compétences et à élaborer un projet professionnel cohérent.
  • Briller en entretien : Elles permettent de démontrer ses compétences de manière concrète et convaincante lors des entretiens. Elles renforcent sa crédibilité auprès des employeurs, collègues et clients.
  • Développer sa carrière : Elles aident à identifier ses points forts et à orienter son développement professionnel.

Or, avoir des compétences ne suffit pas. Il faut aussi savoir en parler d’une manière convaincante. C’est pourquoi s’approprier ses RP, bien les connaître et les incarner en les racontant est fondamental.

Comment construire une réalisation probante ?

Trois étapes sont utiles pour produire un inventaire de ses RP :

  1. Choisir des réalisations pertinentes qui soient:

    • Transférables : Utilisables dans d’autres métiers.
    • Evocatrices : Compréhensibles et convaincantes.
    • Calibrées : Ni trop larges, ni trop étroites.
  2. Structurer les RP : selon le canevas
    • Circonstances : Décrire le contexte (date, lieu, fonction).
    • Mission et Enjeu : Expliquer la mission et son importance.
    • Analyse : Diagnostiquer la situation.
    • Actions : Décrire les actions entreprises.
    • Résultats : Présenter les résultats obtenus.
    • Compétences : Identifier les compétences mises en œuvre.
  3. Les valider et les affiner : selon la check-liste

    • Clarté et Cohérence : la RP est-elle claire et compréhensible par tous ? Est-elle pertinente ? Y a-t-il cohérence entre les différents éléments la structurant ?
    • Conviction : L’intervenant est-il convaincant en présentant sa RP ?
Exemple de réalisation probante

Imaginons une juriste d’entreprise, Marie, qui souhaite démontrer ses compétences d’analyse et de synthèse. Voici un exemple de réalisation probante qu’elle a construite :

  • Circonstances : On a demandé à Marie d’analyser et de synthétiser les risques juridiques liés à l’expansion internationale de son entreprise dans trois nouveaux marchés (États-Unis, Allemagne et Chine).
  • Mission et enjeu : Cette mission devait permettre de diminuer le risque lié à l’expansion internationale de la firme, ainsi que le temps nécessaire pour décider de l’implantation dans un nouveau pays.
  • Actions :
    • Analyse des réglementations locales : Tout d’abord, la juriste a étudié les réglementations locales de chaque marché, identifiant ainsi 150 lois et régulations pertinentes.
    • Évaluation des risques : Ensuite, elle a évalué les risques pour l’entreprise, en identifiant 25 risques majeurs et 40 risques mineurs.
    • Synthèse des informations : Enfin, elle a synthétisé ces informations dans un rapport de 30 pages, mettant en avant les 10 risques les plus critiques et proposant des stratégies d’atténuation pour chacun.
  • Résultats :
    • Réduction des risques : Grâce à ses recommandations, l’entreprise a pu réduire les risques juridiques de 60 %.
    • Gain de temps : De plus, le rapport a permis à l’équipe de direction de prendre des décisions éclairées en 50 % moins de temps que prévu.
    • Économies financières : Enfin, les stratégies d’atténuation proposées ont permis d’économiser environ 500.000 € en coûts potentiels de litiges.

Cet exemple démontre clairement la capacité de la juriste à analyser des informations complexes, à les synthétiser de manière concise et à fournir des recommandations pratiques et quantitativement mesurables.

CONSEILS POUR CONCEVOIR DE BONNES RÉALISATIONS PROBANTES

Pour identifier et mettre en valeur vos réalisations probantes, voici quelques étapes à suivre :

  • Réfléchissez à vos expériences passées : Tout d’abord, pensez aux projets, tâches ou responsabilités où vous avez eu un impact significatif. Ensuite, notez les moments où vous avez atteint ou dépassé vos objectifs. Par ailleurs, consultez vos évaluations de performance : relisez-les pour identifier les points forts et les succès mentionnés par vos supérieurs. De plus, pensez aux récompenses ou reconnaissances que vous avez reçues.
  • Identifiez les moments clés : Ensuite, notez les projets importants auxquels vous avez contribué et les résultats obtenus. De même, souvenez-vous des défis que vous avez relevés avec succès.
  • Quantifiez vos réalisations : Par la suite, décrivez les impacts concrets de vos actions. En outre, utilisez des chiffres pour illustrer vos succès (par exemple, augmentation du chiffre d’affaires de 20%).
  • Soyez précis et détaillé : Expliquez comment vous avez atteint vos objectifs. En plus, détaillez les compétences et les qualités que vous avez mises en œuvre.
  • Gardez des notes régulières : À l’avenir, prenez l’habitude de noter vos résultats et les actions que vous entreprenez pour faciliter ce travail.
  • Soyez concis : Enfin, vous devez être capable d’exprimer une RP en deux minutes environ.

Il est bon de travailler une ou deux RP en situations d’échec à portée pédagogique en soulignant les enseignements tirés pour éviter que la situation ne se reproduise.

Pour finir

Les réalisations probantes sont des outils puissants pour démontrer vos compétences et votre valeur professionnelle. En les identifiant et en les documentant soigneusement, vous pouvez renforcer votre crédibilité et accélérer votre développement de carrière. N’hésitez pas à mettre en avant vos succès et à les utiliser comme levier pour atteindre vos objectifs professionnels.

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Insertion professionnelle Mentorat

Le Projet Professionnel : Votre Boussole vers l’Emploi

Un projet professionnel bien défini est la clé pour réussir sa recherche d’emploi.

Le projet professionnel permet de définir un parcours clair et structuré vers l’emploi. Il précise notamment les activités du métier visé. Et aussi les forces de la personne par rapport aux pré-requis de ce métier. Ses faiblesses et la manière dont elle va les pallier. Enfin l’état du marché et sa capacité à y pénétrer.

Dans cet article, nous allons découvrir ses différentes facettes.

Un projet professionnel : pourquoi faire?

Voici quelques raisons pour lesquelles il est crucial :

  • Orienter et motiver : les moins expérimentés dans la recherche d’emploi identifient leurs intérêts, leurs valeurs, leurs compétences et les conditions de travail désirées. Cela renforce ainsi leur motivation et leur engagement
  • Planifier sa carrière : bien défini, le projet permet de planifier les étapes pour atteindre ses objectifs de carrière. En particulier la formation, les stages et les expériences professionnelles
  • Aider l’accompagnement : Il facilite le suivi, en particulier par les conseillers en insertion professionnelle. Ils peuvent alors proposer des solutions adaptées aux besoins de chaque personne
  • Vérifier l’adéquation avec le marché: il décrit les compétences requises pour le poste souhaité. Ainsi il identifie l’écart avec les compétences de la personne. Il confirme aussi qu’un marché existe pour ce poste
  • Rechercher des opportunités : avec un projet clair, la personne cible mieux les opportunités de formation et d’emploi adéquates
  • Préparer les entretiens: plus le projet professionnel sera précis et documenté, plus il sera facile de préparer un entretien de recrutement. On pourra alors facilement écrire une présentation de ce projet professionnel. Ou bien articuler son parcours pour démontrer que l’on a plusieurs des compétences requises pour le poste. Ou encore répondre aux questions du recruteur sous forme de mise en scène de réalisations probantes (voir le coup de fil)
Que contient-il?

Un projet professionnel comporte a minima les rubriques suivantes:

  • La mission visée: métier, secteur, rattachement hiérarchique, liste des activités y compris celles critiques, fourchette de rémunération, critères de performance de la fonction, parcours typique des personnes en poste
  • Le marché pour ce poste: le marché est-il porteur? Obstacles actuels, entreprises cibles
  • La personne dans ce poste: atouts (envies, compétences illustrées par des réalisations probantes, expérience, cv), freins: compétences manquantes, facteurs de différenciation

La durée d’élaboration d’un projet professionnel dépend de plusieurs facteurs. Quelle connaissance a-t-on du secteur et de la fonction visés? Le marché est-il porteur? Le projet est-il complexe? Y a-t-il urgence de l’intervenant à aboutir? S’agit-il d’un projet de création? etc.

Comment le rédiger?

La rédaction d’un projet professionnel se fait en trois étapes :

  1. Auto-évaluation : l’intéressé commence par une réflexion sur ses compétences, ses intérêts et ses valeurs. Par exemple, des outils comme des tests de personnalité ou des bilans de compétences peuvent être utiles. En outre, une approche collective telle que celle de l’AVARAP permet d’avoir des retours constructifs sur cette auto-évaluation
  2. Recherche d’informations : Il est important de se renseigner sur les métiers, les secteurs d’activité, les entreprises-cibles et les formations disponibles. Pour cela, les missions locales et les centres d’information et d’orientation peuvent fournir des ressources précieuses. Il est également important de rencontrer des gens qui exercent le métier correspondant au projet professionnel (voir l’entretien informationnel)
  3. Rédaction du document : Le projet professionnel doit être rédigé de manière claire et structurée en s’inspirant du plan-type précédent. Les plus jeunes ont quelquefois du mal à formaliser leur projet. Si c’est le cas, il est capital que l’accompagnant (conseiller en insertion, parrain) se bâtisse une idée du projet de la personne pour identifier les carences dans sa réflexion. Il est une sorte de boussole qui oriente l’accompagnement (voir la posture de l’accompagnant)
un processus itératif

L’intéressé construit son projet professionnel et le met constamment à jour à partir des informations provenant des entretiens informationnels, des recherches personnelles, de salons professionnels et, s’il en bénéficie, de l’aide de l’accompagnant ou du groupe. C’est un processus itératif qui se construit dans le temps.

Pour éviter que le projet professionnel ne soit conçu en vase clos, la personne trouve souvent utile de le présenter à quelqu’un comme son conesiller d’insertion ou son coach, comme il le ferait à un professionnel qui ne le connaît pas. Ainsi, dans une démarche de recherche collective, comme celle de l’AVARAP, le bénéficiaire reçoit des retours du groupe qui contribuent à améliorer son projet et à en éprouver la cohérence.

Comment l’utiliser?

Une fois rédigé, le projet professionnel peut être utilisé de plusieurs façons :

  • Outil de communication : Il peut être présenté aux conseillers en insertion, aux employeurs potentiels et aux organismes de formation pour montrer la détermination et la clarté des objectifs du bénéficiaire.
  • Guide personnel : Le projet sert de feuille de route pour la personne en recherche, l’aidant à rester concentrée et motivée tout au long de son parcours.
  • Évaluation et ajustement : Il est important de revoir régulièrement le projet pour évaluer les progrès et ajuster les objectifs et le plan d’action en fonction des nouvelles expériences et des opportunités qui se présentent.

En conclusion, le projet professionnel est un outil puissant pour toute personne en recherche, y compris les jeunes éloignés de l’emploi. De fait, il offre une direction claire et un soutien structuré pour atteindre ses objectifs de carrière.

 

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Communication Psychologie Toastmasters

Comment mieux évaluer avec la pratique délibérée ?

Découvrez dans cet article comment appliquer les principes scientifiques de l’apprentissage à l’évaluation Toastmasters, une compétence essentielle pour développer votre art oratoire

Dans un article précédent, nous avons vu comment s’améliorer en improvisations grâce à la pratique délibérée. Cette dernière est une méthode scientifique pour acquérir et améliorer n’importe quelle compétence.

Aujourd’hui, nous allons montrer comment vous pourriez appliquer ces principes à l’évaluation Toastmasters. L’évaluation constitue la clé de voûte de la méthode Toastmasters. Car elle permet d’aider les orateurs à s’améliorer et à gagner en confiance.

Qu’est-ce que la pratique délibérée ?

Pour rappel, la pratique délibérée se distingue de la simple pratique par plusieurs caractéristiques :

  • Elle se fixe un objectif spécifique et mesurable, qui correspond au niveau de performance souhaité.
  • Elle implique de se confronter à des défis qui dépassent nos capacités actuelles.
  • Elle a besoin d’un retour immédiat et constructif, pour identifier nos erreurs et nos points à améliorer.
  • Elle se focalise sur le processus plutôt que sur le résultat. Elle cherche à comprendre les principes sous-jacents à la compétence visée.
  • Elle repose sur la répétition et la révision régulières, pour consolider les acquis et renforcer la mémoire.
  • Elle s’inspire des meilleurs, en se comparant aux experts du domaine et en s’appropriant leurs méthodes et leurs stratégies.
Comment appliquer la pratique délibérée a l’évaluation Toastmasters ?

De fait, l’évaluation de discours est l’exercice d’apprentissage le plus important dans la méthode Toastmasters. Elle permet de développer plusieurs compétences, en particulier l’écoute, l’attention, la formalisation d’un point de vue et l’expression de celui-ci devant un auditoire dans un temps limité (moins de 3 minutes et demie).

Voici comment vous pourriez utiliser les principes précédents de la pratique délibérée pour vous préparer et réussir vos évaluations :

avoir un objectif et se lancer un defi
  • Avoir un objectif spécifique et mesurable : avant de vous entraîner aux évaluations, définissez clairement ce que vous souhaitez améliorer. Par exemple, vous pouvez vouloir augmenter la durée de votre prise de parole, réduire votre stress, mieux structurer votre discours ou parler sans notes. Choisissez un objectif qui soit adapté à votre niveau actuel et qui soit quantifiable. Par exemple, vous pouvez mesurer la durée de votre évaluation, la fidélité de votre présentation orale par rapport à vos notes ou le nombre d’idées que vous développez.
  • Sortir de sa zone de confort : progresser, en évaluation comme ailleurs, nécessite de se mettre en difficulté. Et de trouver un terrain d’entraînement en solo, sans risque. Pour cela, la première étape est de se constituer une bibliothèque de discours cibles sur lesquels portera votre évaluation. D’ailleurs, les discours TEDx, comme celui-ci, sont une mine de discours sur des sujets très variés.
recevoir des retours et comprendre le fonctionnement
  • Obtenir un retour immédiat et constructif : un retour sur votre performance permet de savoir si vous avez atteint ou non votre objectif. Dans les clubs Toastmasters, l’évaluateur général de la séance est là pour donner un retour aux évaluateurs. Quand vous vous entraînez en solo, le mieux est de vous filmer ou de vous enregistrer, pour pouvoir analyser ensuite votre évaluation, votre voix, votre langage corporel… Vous pouvez aussi demander l’avis d’un mentor ou d’un pair expérimenté, qui saura vous donner des conseils personnalisés et des pistes d’amélioration.
  • Se concentrer sur le processus plutôt que sur le résultat : comprendre comment fonctionne une évaluation, quels sont les éléments qui la composent et comment les articuler en facilite la maîtrise. La pratique délibérée développe la conscience de ses forces et de ses faiblesses, de ses stratégies et de ses réflexes. Se concentrer sur la bienveillance qu’on témoigne dans une évaluation, sa capacité à argumenter, à donner des pistes utiles permet d’apprendre de ses erreurs et de ses succès, en identifiant ce qui a marché ou pas, et comment s’améliorer.
répéter et apprendre des meilleurs
  • Répéter régulièrement : pour ancrer les habitudes de l’évaluation, il faut les pratiquer fréquemment, au moins une fois par semaine, voire plus si possible.
  • Chercher à se comparer aux meilleurs évaluateurs : observez comment ils argumentent, comment ils structurent leur discours, comment ils utilisent leur voix, leur regard, leur geste… Essayez de comprendre ce qui fait leur force, leur originalité, leur impact. Vous pouvez pour cela assister à des concours interclubs où les meilleurs se comparent en évaluant le même discours.
pour aller plus loin

Les évaluations Toastmasters sont un excellent moyen de développer votre art oratoire. Mais pour en tirer le meilleur parti, il faut les pratiquer avec méthode et rigueur. La pratique délibérée est une approche scientifique qui vous permettra d’atteindre un niveau d’excellence dans cette compétence. En appliquant les principes de la pratique délibérée, vous verrez votre aisance verbale, votre confiance en vous et votre impact sur votre auditoire augmenter considérablement.

Vous voulez rencontrer des évaluateurs expérimentés et participer à une séance d’évaluation lors d’une prochaine réunion ? C’est par ici.

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Communication Toastmasters

Toastmasters 75 : le club qui vous ouvre les portes du monde grâce à l’anglais

Vous nous avez rendu visite dans le passé ? Peut-être êtes-vous déjà un adepte de la méthode Toastmasters en français ?

Passez maintenant à la vitesse supérieure : rejoignez un club anglophone !

Partenaire de l’Etincelle/SCINTILLE !, le club Toastmasters 75 offre un environnement bienveillant et stimulant, où chaque membre a la possibilité de s’améliorer en communication et en leadership.

Depuis 30 ans, le club Toastmasters 75 a accompagné des centaines de personnes dans leur parcours personnel et professionnel, en leur offrant formation, évaluation, conseils et soutien dans l’atmosphère amicale et paisible du Forum 104 à Montparnasse.

Pourquoi rejoindre Toastmasters 75 ? Voilà quelques raisons :

  • Apprendre les techniques de prise de parole spécifiques à l’anglais : Rejoindre Toastmasters 75 est une excellente occasion d’améliorer votre éloquence en anglais. Vous aurez l’opportunité de parler, d’écouter et de vous exprimer dans cette langue. Vous pourrez perfectionner votre prononciation, votre vocabulaire et votre aisance à l’oral.
  • Élargir vos opportunités professionnelles et personnelles : Maîtriser un anglais fluide et polyvalent est un atout majeur sur le marché du travail. Rejoindre Toastmasters 75 peut vous aider à développer vos compétences linguistiques et à renforcer votre CV. Le club rassemble des membres de différentes nationalités et cultures. Vous élargirez vos horizons et apprendrez à communiquer avec des personnes du monde entier.
  • Élargir son réseau : Toastmasters 75 offre un réseau international. Vous pourrez rencontrer des professionnels, des entrepreneurs et des leaders d’opinion venant de divers secteurs.
  • Devenir champion du monde de l’éloquence : Toastmasters 75 est souvent impliqué dans des concours de discours et d’évaluation au niveau international. C’est une opportunité de vous mesurer à des concurrents du monde entier.

Pour participer sans engagement à une réunion Toastmasters 75, il suffit de cliquer ici. Choisissez la date de votre réunion et remplissez le formulaire. IMPORTANT : n’oubliez pas d’inscrire le coupon code TM75FEB2024 pour bénéficier d’un crédit de 10€. Vous participerez ainsi gratuitement à la réunion.

N’hésitez pas à franchir la barrière linguistique et à explorer de nouvelles opportunités au sein de Toastmasters 75 ! 🌐🗣️

Et on termine en chanson !

ln the crowd, you may feel small

But let me tell you, you’ve got it all

Your voice is powerful, let it soar

Don’t hold back, unlock that door (oh-oh)

 

Take the stage, let your voice be heard (oh-oh)

Toastmasters 75, where dreams are served (woo!)

Speak your truth, light up the room

With confidence and skills, you’ll conquer gloom (yeah-yeah)

Join the journey, embrace the fear

Toastmasters 75, your path is clear (oh)

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Mentorat Psychologie

Apprendre à danser le tango avec l’entretien motivationnel

Changez grâce à l’entretien motivationnel, une approche collaborative et empathique qui s’inspire du tango

Vous voulez changer quelque chose dans votre vie, mais vous ne savez pas comment vous y prendre ? Des doutes, des peurs, des résistances vous empêchent de passer à l’action ? Vous aimeriez être accompagné par quelqu’un qui vous écoute, vous comprend et vous aide à trouver vos propres solutions ? Alors, vous devriez découvrir l’entretien motivationnel, une méthode qui a fait ses preuves dans de nombreux domaines.

L’entretien motivationnel, qu’est-ce que C’EST ?

L’entretien motivationnel est une méthode de communication qui vise à renforcer la motivation d’une personne à changer un comportement problématique. Il s’agit d’un dialogue collaboratif entre un professionnel (médecin, coach, conseiller, etc.) et son client. Le professionnel y adopte une attitude empathique, respectueuse et dépourvue de jugement. Le but est d’aider le client à explorer et à résoudre son ambivalence. L’ambivalence, c’est hésiter entre des raisons de changer et des raisons de ne pas changer.

L’entretien motivationnel repose sur quatre principes fondamentaux :

  • Exprimer de l’empathie : en se mettant à la place du client. Pour comprendre son point de vue, ses émotions, ses besoins. Sans le critiquer ni le blâmer.
  • Développer le discours de changement : en encourageant le client à exprimer les raisons pour lesquelles il veut changer. En particulier les avantages qu’il en attend et la confiance en sa capacité à changer.
  • Gérer la résistance : en évitant de s’opposer au client, de chercher à le persuader ou de se confronter avec lui. Mais plutôt en l’accompagnant dans son cheminement, en respectant son autonomie et ses choix.
  • Renforcer l’engagement : en aidant le client à prendre une décision, à se fixer des objectifs, à élaborer un plan d’action, à anticiper les difficultés et à trouver des solutions.

Concrètement, le professionnel utilise plusieurs outils. Il peut poser des questions ouvertes, reformuler ce que dit le client, résumer les points clés. Il peut aussi valoriser les efforts et les réussites ou donner de l’information avec son accord.

L’ENTRETIEN MOTIVATIONNEL, CA MARCHE DANS QUELS DOMAINES ?

L’entretien motivationnel a été créé dans les années 1980 par le psychiatre américain William Miller. A l’époque, il cherchait à améliorer le traitement de l’alcoolisme. Il a constaté que les médecins qui réussissaient le mieux à aider leurs patients à arrêter de boire avaient en commun certaines caractéristiques, comme l’empathie, la collaboration, l’évocation et l’autonomie. Il a alors formalisé ces principes et les a appelés l’entretien motivationnel.

Depuis, de nombreuses études ont confirmé l’efficacité de l’entretien motivationnel dans divers domaines de la santé. Comme les addictions (tabac, drogues, jeux, etc.). Mais aussi les maladies chroniques (obésité, diabète, etc.). Ou encore la santé mentale (dépression, anxiété, par exemple). Enfin la prévention (vaccination, dépistage, en particulier).

Mais l’entretien motivationnel ne se limite pas au domaine de la santé. Il peut s’appliquer à toute situation où une personne souhaite changer quelque chose dans sa vie, que ce soit dans le domaine professionnel, personnel, familial ou social. Par exemple, il peut aider un détenu à se réinsérer dans la société, un sportif à se préparer à une compétition, un étudiant à choisir son orientation ou un salarié à gérer un conflit.

L’entretien motivationnel, comment l’apprendre ?

Si l’entretien motivationnel vous intéresse, vous pouvez vous y former de diverses manières. Différents médias (livres, articles, vidéos, sites internet, podcasts) vous permettront de découvrir les bases de la méthode.

Des enseignements (formations, ateliers, ou conférences) vous offriront l’occasion de vous entraîner à la pratique de l’entretien motivationnel, avec des cas concrets ou des jeux de rôle, en obtenant des retours de professionnels aguerris.

Plusieurs associations, comme l’Association Francophone de Développement de l’Entretien Motivationnel (AFDEM), rassemblent des professionnels ou des passionnés de l’entretien motivationnel, et qui vous permettront d’échanger, de partager, de vous soutenir et de vous inspirer. Le site de l’AFDEM regorge de ressources utiles por apprendre l’entretien motivationnel.

Enfin, vous pouvez bénéficier de l’entretien motivationnel en tant que client, en faisant appel à un professionnel formé à cette méthode. Il  vous accompagnera dans votre projet de changement, quel qu’il soit.

L’entretien motivationnel, c’est quoi le rapport avec le tango ?

Vous vous demandez peut-être pourquoi j’ai choisi comme titre de cet article “Apprendre à danser le tango avec l’entretien motivationnel”. En fait, c’est une métaphore que j’ai empruntée à William Miller, le père de l’EM, et qui m’a beaucoup plu.

Miller compare l’entretien motivationnel à une danse, le tango, qui se caractérise par une relation harmonieuse entre deux partenaires, qui se déplacent ensemble, en suivant le rythme de la musique, mais en gardant chacun leur liberté de mouvement. Le professionnel, pareil au danseur qui guide le pas, épouse les mouvements du client, qui, comme  l’autre danseur qui suit. Ainsi c’est le professionnel qui oriente la conversation dans la bonne direction, comme le danseur qui mène la danse. C’est cette posture qui constitue l’esprit de l’entretien motivationnel.

Si vous voulez en savoir plus, je vous invite à consulter cette vidéo, qui contient des exemples de questions, de reformulations, de résumés, de valorisations, etc. que le professionnel peut utiliser dans un entretien motivationnel. Vous y trouverez deux extraits qui illustrent la différence entre un entretien classique et un entretien motivationnel, autour de l’arrêt du tabac.

POUR ALLER PLUS LOIN

J’espère que cet article vous a donné envie de découvrir l’entretien motivationnel, et de l’expérimenter dans votre vie. N’hésitez pas à me laisser vos commentaires, vos questions ou vos témoignages, etc. Je serai ravi de vous répondre et de poursuivre la conversation avec vous. A bientôt!

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Communication Insertion professionnelle Mentorat Psychologie

Comment utiliser la théorie socio-cognitive pour le mentorat?

Les outils pratiques de la théorie socio-cognitive (TSC) permettent aux mentors d’augmenter le sentiment d’efficacité personnelle chez leurs bénéficiaires

Dans un article précédent, nous avons présenté la théorie socio-cognitive (TSC) et son intérêt pour accompagner le changement. Nous avons vu également dans un autre billet comment elle pouvait, en particulier, aider à surmonter la peur de parler en public.

A présent, nous nous intéresserons à la manière de l’employer concrètement, dans le cadre des actions de mentorat. Dans ce premier article, nous donnons les clés pratiques pour utiliser la TSC.

LES QUATRE SOURCES DU SENTIMENT d’efficacité PERSONNELLE

Pour rappel, le sentiment d’efficacité personnelle (SEP) est la pierre angulaire de la TSC : l’augmenter va produire des effets sur l’adoption d’un nouveau comportement et le changement qui en résulte.

Or, Bandura, le créateur de la TSC, affirme que le SEP provient de quatre sources : avoir accompli le comportement souhaité par le passé (expérience de maîtrise), modeler son comportement en observant d’autres personnes réussir une tâche (expérience vicariante), être persuadé que l’on peut accomplir une action (persuasion), et réduire les états affectifs et physiologiques qui gênent le nouveau comportement (gestion des états affectifs et physiologiques).

LES EXPÉRIENCES DE MAITRISE

L’approche la plus directe pour créer une expérience de maîtrise est de pratiquer le nouveau comportement. Par exemple, la posture lors d’un entretien d’embauche ou la prononciation d’un discours, après s’être formé aux compétences nécessaires pour réussir.

De fait, les croyances des individus et leurs actions se renforcent mutuellement. La réussite nourrit la conviction d’être efficace qui va favoriser la réussite ultérieure. Une spirale ascendante s’établit donc entre expérience de maîtrise et efficacité personnelle.

Le tableau suivant résume les techniques qui nourrissent les expériences de maîtrise.

Techniques Exemples
Pratiquer le comportement-cible avec succès Acquérir des compétences, par exemple la formation à l’entretien d’embauche

S’exposer aux situations menaçantes

Expérimenter graduellement Se fixer des cibles intermédiaires de difficulté croissante en vue d’atteindre le comportement visé, par exemple hiérarchiser des situations anxiogènes ou bien augmenter la dose d’exercice physique chaque semaine
Pratiquer l’imagerie mentale Imaginer le succès ou les progrès, simuler le comportement mentalement, visualiser la tâche, par exemple l’exposition volontaire dans le traitement des phobies, ou bien la résistance aux tentations de fumer
Se préparer aux revers Anticiper les conséquences : par exemple violer une abstinence

Attribuer les revers à des causes externes et les réussites à des causes internes (le travail, le mérite)

Auto-surveiller le comportement et ses résultats Suivre le comportement ainsi que les progrès vers l’objectif, par exemple en tenant un journal de l’alimentation ou de la perte de poids
S’appuyer sur des réussites passées Raconter des situations de maîtrise, par exemple des récits autobiographiques de réalisations probantes, pour transférer des stratégies efficaces à de nouveaux comportements.
Adopter un état d’esprit tourné vers l’apprentissage Donner la priorité au développement de nouvelles compétences plutôt qu’à l’évitement ou à la réussite
LES EXPERIENCES VICARIANTES

Observer une personne (“modèle”) effectuer une tâche que l’on désire effectuer et la voir réussir est une expérience vicariante. Celle-ci permet d’instiller la croyance que l’on peut soi-même y arriver. En plus, elle renseigne sur les stratégies et les compétences utiles pour surmonter certains obstacles. On peut d’ailleurs s’observer soi-même (“auto-modélisation”). Plus le modèle surmonte de difficultés et plus il ressemble à l’observateur, plus l’expérience sera utile à l’observateur.

Le tableau suivant résume les techniques pour susciter les expériences vicariantes.

Techniques Exemples
Observer des modèles (réels ou symboliques) Observer des personnes aux caractéristiques proches des siennes effectuer le comportement avec succès : par ex. des modèles réels dans des groupes de soutien, ou des modèles symboliques dans des récits inspirants
S’auto-modeler Produire des témoignages (par ex. en video) de l’exécution réussie par soi-même du comportement, par exemple l’enregistrement vidéo d’une séance d’entraînement à la formation à l’entretien d’embauche
LA PERSUASION VERBALE

La persuasion nous donne l’assurance que d’autres personnes croient en notre capacité à réussir. Elle fournit aussi une validation de nos progrès sur le chemin du changement. De même, l’auto-persuasion s’avère efficace, notamment dans la recherche d’emploi, en recourant par exemple à des mantras.

Cependant la persuasion verbale reste une source d’auto-efficacité moins fiable que les deux précédentes. Elle peut même s’avérer contre-productive. En effet, si un souvenir d’échec a sapé notre capacité à réussir, la persuasion pourrait déclencher au contraire de la résistance.

Le tableau suivant résume les techniques de persuasion verbale :

Techniques Exemples
Recevoir des encouragements de la part de personnes crédibles Véhiculer la croyance que la réussite du comportement est très probable
Exprimer un discours intérieur à caractère pédagogique ou motivationnel Réciter un discours intérieur motivationnel

S’auto-guider verbalement, par exemple en se répétant les étapes du comportement

Identifier les pensées dysfonctionnelles et les transformer en alternatives positives

 

LA gestion des États affectifs et physiologiques

Commencer une tâche difficile, surtout si elle est nouvelle, déclenche de l’appréhension chez la plupart d’entre nous. Elle s’accompagne généralement de symptômes physiologiques ou affectifs (par exemple, une augmentation du rythme cardiaque, de la transpiration). Si nous interprétons la cause de ces signes comme un manque de préparation, ou comme la prédiction d’un échec, ceux-ci peuvent diminuer notre sentiment d’efficacité personnelle et altérer nos performances ultérieures.

Pour Bandura, les expériences de maîtrise, présentées plus haut, en améliorant les compétences d’adaptation, font percevoir l’avenir comme moins menaçant. Ainsi, les pensées anxieuses qui peuvent tout de même survenir, ne submergeront pas l’individu.

Le tableau suivant résume les autres techniques de gestion des états affectifs et physiologiques :

Techniques Exemples
Pratiquer la psycho-éducation Expliquer comment les processus mentaux influent sur les fonctions biologiques: par exemple, les conséquences somatiques et affectives de dramatiser des symptômes corporels anxiogènes, apprendre à interpréter la nervosité comme le signe de que le corps est prêt, corriger les interprétations erronées de symptômes corporels ressentis comme des menaces
Utiliser le biofeedback Démontrer l’association corps-esprit
Identifier et acquérir des capacités d’adaptation (Se) Former à des stratégies d’adaptation, de relaxation ou de gestion du stress afin d’accroître la préparation et de contrôler les états physiologiques et affectifs néfastes avant et pendant l’exécution du comportement
Tester les capacités d’adaptation Collecter des informations permettant de corriger les symptômes physiologiques et affectifs en réalisant des expériences comportementales, par exemple, la maîtrise de la situation redoutée avec le thérapeute lors d’une séance d’exposition systématique
POUR ALLER PLUS LOIN

En conclusion, la TSC permet d’améliorer le SEP du bénéficiaire d’une action de mentorat en agissant sur les 4 sources à l’origine de ce sentiment.

Dans un prochain article, nous présenterons la manière d’employer ces outils face à des situations réelles de mentorat. Nous nous appuierons pour cela sur des exemples tirés de l’insertion professionnelle et de la prise de parole en public.

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Communication Psychologie

Comment surmonter la peur de parler en public grâce à la théorie socio-cognitive?

La théorie socio-cognitive (TSC) permet de meilleures prises de parole en public

Dans un précédent article, nous avons vu que la peur de parler en public était très répandue. Elle pouvait être aussi très handicapante. Dans cet article, nous allons voir comment la TSC permet de surmonter la peur de parler en public.

NOS DOUTES ? DES TRAITRES !

La peur de parler en public est une forme de phobie sociale. A ce propos, le père de la TSC, Albert Bandura a beaucoup étudié les phobies. Pour lui, l’anxiété découle d’un faible croyance en ses capacités à surmonter la peur. Il a baptisé cette croyance sentiment d’efficacité personnelle (SEP). Ainsi, comme l’écrivait William Shakespeare, “nos doutes sont des traitres et nous privent de ce que nous pourrions souvent gagner de bon parce que nous avons peur d’essayer.”

De fait, les chercheurs ont mis en évidence un lien entre SEP et peur de parler. Ainsi des étudiants formés à structurer leur discours et utiliser leur voix ont vu leur anxiété baisser. Au travers de telles formations, les personnes se convainquent de l’amélioration de leurs compétences et augmentent leur SEP.

Plus généralement, dans le traitement des phobies sociales, agir sur le SEP en améliore le résultat. Si, après le traitement, les patients constatent une amélioration de leurs compétences sociales, les situations redoutées leur apparaissent moins menaçantes. D’ailleurs, une intervention manipulant le SEP a montré plus d’effet que l’exposition systématique ou la restructuration cognitive, thérapies traditionnelles pour soigner les phobies sociales.

LE RÔLE FONDAMENTAL DU SENTIMENT D’EFFICACITÉ PERSONNELLE

La synthèse de la littérature sur les phobies sociales permet de mettre en évidence le modèle socio-cognitif de la prise de parole en public :

Pour commencer, le SEP exerce son effet sur la peur de parler en public à travers les attentes de résultats qu’un orateur peut espérer de sa prestation. Ainsi, l’anxiété apparait lorsque les personnes désirent donner une impression particulière sur les autres (le résultat attendu) mais doutent qu’ils en soient capables (le SEP). Et plus le coût de l’échec est élevé, plus l’anxiété est importante.

En outre, les orateurs anxieux émettraient plus fréquemment des doutes sur leur capacité à créer les impressions désirées sur le public et s’attendraient à ce que leur performance soit en-dessous de leurs attentes. Ils auraient également tendance à évaluer les résultats de leurs prises de parole plus négativement que les sujets normaux, et indépendamment du résultat objectif.

SON ACTION SUR LE COMPORTEMENT

Ensuite, le SEP impacte les facultés de la personne à s’auto-gérer. Ce sont par exemple la capacité à s’auto-évaluer, à se fixer des objectifs et à activer des stratégies efficaces. Entre autres, on a montré que les phobiques sociaux ont du mal à définir et à atteindre des objectifs sociaux

Enfin, le SEP influence l’effet de l’environnement externe, comme par exemple faire face à un public hostile. Dans cette situation, le pouls d’un orateur de faible SEP a tendance à accélérer davantage qu’un orateur de forte SEP.

Dans la suite de la chaîne, l’attente de résultats, les facultés d’auto-gestion et la perception de l’environnement conditionnent à leur tour le comportement de l’orateur, en particulier s’il recherchera ou évitera les situations de communication. Un orateur à faible SEP aura tendance à éviter les prises de parole en public. Cette stratégie d’évitement va créer à son tour une boucle de renforcement. Comme une prophétie auto-réalisatrice, l’évitement va convaincre la personne qu’elle n’a pas les compétences adéquates, amoindrissant son SEP et intensifiant l’évitement.

LES BONNES PRATIQUES RÉVÉLÉES PAR LA SCIENCE

Selon les études qui donnent crédit au modèle socio-cognitif de la prise de parole en public évoqué précédemment, un comportement adéquat mène à des résultats probants. Quelles sont donc les bonnes pratiques que la science nous fait découvrir ?

Tout d’abord, entraîner son attention augmente significativement la qualité d’une prise de parole. En effet, l’orateur maitrisant son attention attache moins d’importance aux signaux négatifs externes, issus de l’environnement, ou internes, comme les pensées intrusives. Cela désinhibe sa parole et en améliore la qualité.

De même, lors de la planification d’un discours, la prise en compte explicite des besoins de l’auditoire améliore les performances. D’autre part, répéter son discours, seul ou devant un public, améliore aussi le rendu. En particulier, cela diminue l’anxiété et augmente la propension à communiquer. Enfin, recevoir des évaluations ou s’auto-évaluer est une bonne pratique. De fait, l’absence de retour afaiblirait la confiance des orateurs en leurs propres compétences.

POUR ALLER PLUS LOIN

La TSC paraît adéquate à rendre compte des phénomènes psychologiques à l’œuvre dans la prise de parole en public. L’intérêt de cette théorie est que le SEP, son concept central, est lui-même malléable. Des interventions spécifiques peuvent donc le modifier. En présenter un échantillon sera l’objet d’un prochain article.

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Mentorat Non classé Psychologie

Comment accroître l’utilité de l’entretien motivationnel ?

L’associer à d’autres techniques permet d’en dépasser les limites

Dans un précédent article, nous avons présenté l’entretien motivationnel (EM) comme un outil prometteur dans le domaine du mentorat. A présent, nous nous attacherons à en montrer les limites et les perspectives pour en améliorer l’utilité.

UN SUCCÈS MODÉRÉ

Depuis les années 1980, l’entretien motivationnel a fait l’objet de nombreuses études pour en prouver l’efficacité. Force est de constater que les effets de l’EM sont relativement modestes.

Dans une méta-analyse de 2010 comprenant 119 interventions, des chercheurs ont calculé une faible taille d’effet de l’EM (d=0,22). A titre de repère, le NICE (National Institute for Health and Care Excellence) britannique préconise un seuil de taille d’effet de 0,5 pour qu’un traitement soit significatif sur le plan clinique. D’ailleurs, un quart de ces études n’ont pas eu d’effet ou eu un effet négatif. En outre, les meilleurs résultats provenaient d’essais cliniques de petite taille, donc de qualité médiocre. Enfin, le résultat de certaines études avec de multiples résultats a amélioré artificiellement l’efficacité.

Une autre méta-analyse sur l’abus de substances nocives a mis en évidence que l’effet de l’EM s’évanouissait dans le temps. En effet, la taille d’effet baissait de 0,77 à un mois à 0,11 après 12 mois.

Pourquoi de tels résultats un peu décevants ? Le psychologue Albert Bandura explique, à propos du traitement des addictions, que “[certes] on peut s’efforcer d’augmenter la motivation à démarrer le traitement. Mais si l’engagement du patient à changer ses habitudes est faible ou inexistant, il est préférable de différer le traitement dans le futur quand ses préoccupations seront plus prégnantes. Car l’échec d’efforts mi-chèvre mi-chou ne peut que renforcer la croyance en la futilité de ces efforts pour changer. Il faut que le changement se traduise rapidement pas des résultats positifs car sinon, l’échec va au contraire renforcer le sentiment d’inefficacité”. Autrement dit, l’EM peut se révéler utile pour augmenter temporairement la motivation, mais il faut d’autres relais pour que cette motivation perdure.

L’EM RENFORCE L’ENGAGEMENT DANS LE TRAITEMENT

Il ne faudrait cependant pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Ainsi, lorsque l’EM est conjugué avec une autre approche, il peut contribuer à en améliorer les effets. Prenons l’exemple des thérapies cognitivo–comportementales (TCCs).

Tout d’abord, compléter une TCC avec de l’EM en améliore le résultat. C’est le cas de l’abus d’alcool, de cocaïne, de l’anxiété généralisée et des troubles du comportement chez l’enfant.

Par ailleurs, selon une étude qualitative, les thérapeutes obtenant les meilleurs résultats avec leurs patients ont des caractéristiques communes. Leurs patients sentent qu’ils sont plus à leur écoute et davantage dans la collaboration. Ils les engageent plus activement à suivre leur traitement. Or ce sont là des compétences que développe l’EM, contribuant ainsi à améliorer la relation thérapeutique en la rendant plus humaine.

Enfin, l’EM, en augmentant la motivation et en diminuant l’ambivalence, pourrait augmenter l’adhésion au traitement, comme dans le traitement de la dépression pour effectuer les exercices en dehors des séances. Or, un des inconvénients majeurs des TCC est leur taux important d’attrition et de récidive (environ 50% des sujets abandonnent le traitement ou rechutent).

L’EM peut donc constituer un excellent tandem pour amplifier cette motivation. A ce titre, l’EM peut être utilisé en prétraitement pour augmenter l’engagement du bénéficiaire de commencer le traitement, ou bien en cours de traitement, à chaque fois que la motivation chute.

POUR ALLER PLUS LOIN

Si l’EM n’est pas une panacée, il est de nature à améliorer les traitements auxquels il est adjoint. Dans un prochain article, nous nous intéresserons à un de ces traitement pour le mentorat.

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Mentorat Psychologie

Comment accompagner le changement avec la théorie socio-cognitive ?

Cette théorie psychologique, née au 20ème siècle, est utile dans les démarches de mentorat

Dans un article précédent, nous avons expliqué l’utilité de l’entretien motivationnel (EM) pour le mentorat. Cependant son efficacité reste limitée, à moins qu’il ne soit associé à une autre technique. Dans cet esprit, nous allons présenter la théorie socio-cognitive (TSC) et montrer en quoi elle pourrait s’appliquer au mentorat.

LA THÉORIE SOCIO-COGNITIVE, QU’EST-CE QUE C’EST ?

Le psychologue canadien Albert Bandura a développé la TSC dans les années 1960, initialement comme une théorie de l’apprentissage. Selon celle-ci, les individus apprennent en observant les comportements des autres en les imitant.

Bandura l’a ensuite enrichie pour en faire une théorie capable de prédire le comportement humain. La TSC postule que les individus sont des agents. Ils sont capables, par leurs propres actions, d’exercer une influence intentionnelle sur leur fonctionnement et sur le cours des événements impactant leur existence.

LA TRIADE DU FONCTIONNEMENT HUMAIN

Pour la TSC, le fonctionnement humain est le produit de l’interaction entre les influences intra-individuelles, du comportement de l’individu et les facteurs liés à l’environnement :

Les déterminants liés à l’individu sont des facteurs internes, tels que les pensées, les sentiments et les croyances. Les déterminants environnementaux sont des événements qui impactent l’individu.

Chacun des déterminants de cette triade interagit réciproquement avec les deux autres. Ainsi un comportement peut influencer les déterminants individuels. Par exemple, lors d’une soirée, un adolescent qui refuse de boire (comportement) pourrait penser : “Mes amis vont me trouver ennuyeux” ou bien “Je pourrai mieux étudier et obtenir une bonne note pour l’examen de lundi”. De même, le comportement peut avoir un impact sur l’environnement. Dans notre exemple, devant son refus de boire, les amis de l’adolescent pourraient faire pression sur lui pour qu’il change d’attitude.

LES DEUX QUESTIONS CLE

Grâce à ces influences réciproques, en particulier sur les facteurs individuels, les individus sont davantage que les produits de leur environnement. Ils peuvent améliorer leurs conditions d’existence.

Pour simplifier à l’extrême, l’individu adopte un comportement après avoir répondu à deux questions. La première est “Est-ce qu’adopter ce changement va modifier ma vie dans un sens positif ?” – en terme technique, on l’appelle l’attente de résultats. La seconde est “Est-ce que je me sens capable d’adopter ce comportement ?” Ce que Bandura baptise le sentiment d’efficacité personnelle (SEP). Si la réponse est oui à ces deux questions, la personne va former l’intention d’adopter le comportement ou se fixer un objectif qui se traduiront par la réalisation du comportement.

LE RÔLE CENTRAL DU SENTIMENT D’EFFICACITÉ PERSONNELLE

Le SEP est central à la théorie car il affecte le comportement directement et indirectement par le biais des autres déterminants : attente de résultats, buts et facteurs environnementaux :

De fait, on a montré que le SEP était le plus fort prédicteur du comportement. De même, le SEP a un effet positif dans plus de 93% des études. Les effets ont d’ailleurs été notés aussi quelles que soient les populations étudiées : enfants (taille d’effet 1,51), adolescents (0,30) adultes étudiants (0,70), adultes non-étudiants (0,66)

le sep est manipulable

L’autre caractéristique intéressante du SEP est que l’individu peut le modifier grâce à 4 moyens. Tout d’abord, en vivant des expériences de maîtrise du comportement-cible (maîtrise guidée). Ensuite, en prenant connaissance d’expériences de maîtrise réalisées par d’autres personnes (modelage). Ou encore, en recevant des encouragements (persuasion sociale). Enfin en contrôlant ses sensations psycho-physiologiques. A ce titre, dans près de 95% des études analysées par les chercheurs, des effets modérés à élevés ont été obtenus du SEP que ce soit par la maîtrise guidée (0,75 de taille d’effet), le modelage (1,02) ou la persuasion verbale (0,40).

POURQUOI EMPLOYER LA SCT EN MENTORAT ?

La théorie socio-cognitive a de nombreuses applications dans différents domaines, notamment l’éducation, la santé, le travail et le sport. En particulier dans deux domaines couverts par le mentorat : la prise de parole devant un public et l’insertion professionnelle.

Par ailleurs, elle dispose d’une communauté nombreuse de chercheurs qui continuent d’approfondir la connaissance. Elle entretient aussi des liens avec l’entretien motivationnel par le biais du SEP. Il a d’ailleurs été montré que l’EM avait un impact positif sur le SEP.

POUR ALLER PLUS LOIN

La théorie socio-cognitive par sa capacité à permettre à l’individu de changer est prometteuse pour le mentorat. Dans un prochain post, nous verrons comment l’utiliser concrètement dans la relation mentor-mentoré.