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Communication Psychologie Toastmasters

Comment mieux évaluer avec la pratique délibérée ?

Découvrez dans cet article comment appliquer les principes scientifiques de l’apprentissage à l’évaluation Toastmasters, une compétence essentielle pour développer votre art oratoire

Dans un article précédent, nous avons vu comment s’améliorer en improvisations grâce à la pratique délibérée. Cette dernière est une méthode scientifique pour acquérir et améliorer n’importe quelle compétence.

Aujourd’hui, nous allons montrer comment vous pourriez appliquer ces principes à l’évaluation Toastmasters. L’évaluation constitue la clé de voûte de la méthode Toastmasters. Car elle permet d’aider les orateurs à s’améliorer et à gagner en confiance.

Qu’est-ce que la pratique délibérée ?

Pour rappel, la pratique délibérée se distingue de la simple pratique par plusieurs caractéristiques :

  • Elle se fixe un objectif spécifique et mesurable, qui correspond au niveau de performance souhaité.
  • Elle implique de se confronter à des défis qui dépassent nos capacités actuelles.
  • Elle a besoin d’un retour immédiat et constructif, pour identifier nos erreurs et nos points à améliorer.
  • Elle se focalise sur le processus plutôt que sur le résultat. Elle cherche à comprendre les principes sous-jacents à la compétence visée.
  • Elle repose sur la répétition et la révision régulières, pour consolider les acquis et renforcer la mémoire.
  • Elle s’inspire des meilleurs, en se comparant aux experts du domaine et en s’appropriant leurs méthodes et leurs stratégies.
Comment appliquer la pratique délibérée a l’évaluation Toastmasters ?

De fait, l’évaluation de discours est l’exercice d’apprentissage le plus important dans la méthode Toastmasters. Elle permet de développer plusieurs compétences, en particulier l’écoute, l’attention, la formalisation d’un point de vue et l’expression de celui-ci devant un auditoire dans un temps limité (moins de 3 minutes et demie).

Voici comment vous pourriez utiliser les principes précédents de la pratique délibérée pour vous préparer et réussir vos évaluations :

avoir un objectif et se lancer un defi
  • Avoir un objectif spécifique et mesurable : avant de vous entraîner aux évaluations, définissez clairement ce que vous souhaitez améliorer. Par exemple, vous pouvez vouloir augmenter la durée de votre prise de parole, réduire votre stress, mieux structurer votre discours ou parler sans notes. Choisissez un objectif qui soit adapté à votre niveau actuel et qui soit quantifiable. Par exemple, vous pouvez mesurer la durée de votre évaluation, la fidélité de votre présentation orale par rapport à vos notes ou le nombre d’idées que vous développez.
  • Sortir de sa zone de confort : progresser, en évaluation comme ailleurs, nécessite de se mettre en difficulté. Et de trouver un terrain d’entraînement en solo, sans risque. Pour cela, la première étape est de se constituer une bibliothèque de discours cibles sur lesquels portera votre évaluation. D’ailleurs, les discours TEDx, comme celui-ci, sont une mine de discours sur des sujets très variés.
recevoir des retours et comprendre le fonctionnement
  • Obtenir un retour immédiat et constructif : un retour sur votre performance permet de savoir si vous avez atteint ou non votre objectif. Dans les clubs Toastmasters, l’évaluateur général de la séance est là pour donner un retour aux évaluateurs. Quand vous vous entraînez en solo, le mieux est de vous filmer ou de vous enregistrer, pour pouvoir analyser ensuite votre évaluation, votre voix, votre langage corporel… Vous pouvez aussi demander l’avis d’un mentor ou d’un pair expérimenté, qui saura vous donner des conseils personnalisés et des pistes d’amélioration.
  • Se concentrer sur le processus plutôt que sur le résultat : comprendre comment fonctionne une évaluation, quels sont les éléments qui la composent et comment les articuler en facilite la maîtrise. La pratique délibérée développe la conscience de ses forces et de ses faiblesses, de ses stratégies et de ses réflexes. Se concentrer sur la bienveillance qu’on témoigne dans une évaluation, sa capacité à argumenter, à donner des pistes utiles permet d’apprendre de ses erreurs et de ses succès, en identifiant ce qui a marché ou pas, et comment s’améliorer.
répéter et apprendre des meilleurs
  • Répéter régulièrement : pour ancrer les habitudes de l’évaluation, il faut les pratiquer fréquemment, au moins une fois par semaine, voire plus si possible.
  • Chercher à se comparer aux meilleurs évaluateurs : observez comment ils argumentent, comment ils structurent leur discours, comment ils utilisent leur voix, leur regard, leur geste… Essayez de comprendre ce qui fait leur force, leur originalité, leur impact. Vous pouvez pour cela assister à des concours interclubs où les meilleurs se comparent en évaluant le même discours.
pour aller plus loin

Les évaluations Toastmasters sont un excellent moyen de développer votre art oratoire. Mais pour en tirer le meilleur parti, il faut les pratiquer avec méthode et rigueur. La pratique délibérée est une approche scientifique qui vous permettra d’atteindre un niveau d’excellence dans cette compétence. En appliquant les principes de la pratique délibérée, vous verrez votre aisance verbale, votre confiance en vous et votre impact sur votre auditoire augmenter considérablement.

Vous voulez rencontrer des évaluateurs expérimentés et participer à une séance d’évaluation lors d’une prochaine réunion ? C’est par ici.

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Communication Toastmasters

Toastmasters 75 : le club qui vous ouvre les portes du monde grâce à l’anglais

Vous nous avez rendu visite dans le passé ? Peut-être êtes-vous déjà un adepte de la méthode Toastmasters en français ?

Passez maintenant à la vitesse supérieure : rejoignez un club anglophone !

Partenaire de l’Etincelle/SCINTILLE !, le club Toastmasters 75 offre un environnement bienveillant et stimulant, où chaque membre a la possibilité de s’améliorer en communication et en leadership.

Depuis 30 ans, le club Toastmasters 75 a accompagné des centaines de personnes dans leur parcours personnel et professionnel, en leur offrant formation, évaluation, conseils et soutien dans l’atmosphère amicale et paisible du Forum 104 à Montparnasse.

Pourquoi rejoindre Toastmasters 75 ? Voilà quelques raisons :

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  • Élargir vos opportunités professionnelles et personnelles : Maîtriser un anglais fluide et polyvalent est un atout majeur sur le marché du travail. Rejoindre Toastmasters 75 peut vous aider à développer vos compétences linguistiques et à renforcer votre CV. Le club rassemble des membres de différentes nationalités et cultures. Vous élargirez vos horizons et apprendrez à communiquer avec des personnes du monde entier.
  • Élargir son réseau : Toastmasters 75 offre un réseau international. Vous pourrez rencontrer des professionnels, des entrepreneurs et des leaders d’opinion venant de divers secteurs.
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N’hésitez pas à franchir la barrière linguistique et à explorer de nouvelles opportunités au sein de Toastmasters 75 ! 🌐🗣️

Et on termine en chanson !

ln the crowd, you may feel small

But let me tell you, you’ve got it all

Your voice is powerful, let it soar

Don’t hold back, unlock that door (oh-oh)

 

Take the stage, let your voice be heard (oh-oh)

Toastmasters 75, where dreams are served (woo!)

Speak your truth, light up the room

With confidence and skills, you’ll conquer gloom (yeah-yeah)

Join the journey, embrace the fear

Toastmasters 75, your path is clear (oh)

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Mentorat Psychologie

Apprendre à danser le tango avec l’entretien motivationnel

Changez grâce à l’entretien motivationnel, une approche collaborative et empathique qui s’inspire du tango

Vous voulez changer quelque chose dans votre vie, mais vous ne savez pas comment vous y prendre ? Des doutes, des peurs, des résistances vous empêchent de passer à l’action ? Vous aimeriez être accompagné par quelqu’un qui vous écoute, vous comprend et vous aide à trouver vos propres solutions ? Alors, vous devriez découvrir l’entretien motivationnel, une méthode qui a fait ses preuves dans de nombreux domaines.

L’entretien motivationnel, qu’est-ce que C’EST ?

L’entretien motivationnel est une méthode de communication qui vise à renforcer la motivation d’une personne à changer un comportement problématique. Il s’agit d’un dialogue collaboratif entre un professionnel (médecin, coach, conseiller, etc.) et son client. Le professionnel y adopte une attitude empathique, respectueuse et dépourvue de jugement. Le but est d’aider le client à explorer et à résoudre son ambivalence. L’ambivalence, c’est hésiter entre des raisons de changer et des raisons de ne pas changer.

L’entretien motivationnel repose sur quatre principes fondamentaux :

  • Exprimer de l’empathie : en se mettant à la place du client. Pour comprendre son point de vue, ses émotions, ses besoins. Sans le critiquer ni le blâmer.
  • Développer le discours de changement : en encourageant le client à exprimer les raisons pour lesquelles il veut changer. En particulier les avantages qu’il en attend et la confiance en sa capacité à changer.
  • Gérer la résistance : en évitant de s’opposer au client, de chercher à le persuader ou de se confronter avec lui. Mais plutôt en l’accompagnant dans son cheminement, en respectant son autonomie et ses choix.
  • Renforcer l’engagement : en aidant le client à prendre une décision, à se fixer des objectifs, à élaborer un plan d’action, à anticiper les difficultés et à trouver des solutions.

Concrètement, le professionnel utilise plusieurs outils. Il peut poser des questions ouvertes, reformuler ce que dit le client, résumer les points clés. Il peut aussi valoriser les efforts et les réussites ou donner de l’information avec son accord.

L’ENTRETIEN MOTIVATIONNEL, CA MARCHE DANS QUELS DOMAINES ?

L’entretien motivationnel a été créé dans les années 1980 par le psychiatre américain William Miller. A l’époque, il cherchait à améliorer le traitement de l’alcoolisme. Il a constaté que les médecins qui réussissaient le mieux à aider leurs patients à arrêter de boire avaient en commun certaines caractéristiques, comme l’empathie, la collaboration, l’évocation et l’autonomie. Il a alors formalisé ces principes et les a appelés l’entretien motivationnel.

Depuis, de nombreuses études ont confirmé l’efficacité de l’entretien motivationnel dans divers domaines de la santé. Comme les addictions (tabac, drogues, jeux, etc.). Mais aussi les maladies chroniques (obésité, diabète, etc.). Ou encore la santé mentale (dépression, anxiété, par exemple). Enfin la prévention (vaccination, dépistage, en particulier).

Mais l’entretien motivationnel ne se limite pas au domaine de la santé. Il peut s’appliquer à toute situation où une personne souhaite changer quelque chose dans sa vie, que ce soit dans le domaine professionnel, personnel, familial ou social. Par exemple, il peut aider un détenu à se réinsérer dans la société, un sportif à se préparer à une compétition, un étudiant à choisir son orientation ou un salarié à gérer un conflit.

L’entretien motivationnel, comment l’apprendre ?

Si l’entretien motivationnel vous intéresse, vous pouvez vous y former de diverses manières. Différents médias (livres, articles, vidéos, sites internet, podcasts) vous permettront de découvrir les bases de la méthode.

Des enseignements (formations, ateliers, ou conférences) vous offriront l’occasion de vous entraîner à la pratique de l’entretien motivationnel, avec des cas concrets ou des jeux de rôle, en obtenant des retours de professionnels aguerris.

Plusieurs associations, comme l’Association Francophone de Développement de l’Entretien Motivationnel (AFDEM), rassemblent des professionnels ou des passionnés de l’entretien motivationnel, et qui vous permettront d’échanger, de partager, de vous soutenir et de vous inspirer. Le site de l’AFDEM regorge de ressources utiles por apprendre l’entretien motivationnel.

Enfin, vous pouvez bénéficier de l’entretien motivationnel en tant que client, en faisant appel à un professionnel formé à cette méthode. Il  vous accompagnera dans votre projet de changement, quel qu’il soit.

L’entretien motivationnel, c’est quoi le rapport avec le tango ?

Vous vous demandez peut-être pourquoi j’ai choisi comme titre de cet article “Apprendre à danser le tango avec l’entretien motivationnel”. En fait, c’est une métaphore que j’ai empruntée à William Miller, le père de l’EM, et qui m’a beaucoup plu.

Miller compare l’entretien motivationnel à une danse, le tango, qui se caractérise par une relation harmonieuse entre deux partenaires, qui se déplacent ensemble, en suivant le rythme de la musique, mais en gardant chacun leur liberté de mouvement. Le professionnel, pareil au danseur qui guide le pas, épouse les mouvements du client, qui, comme  l’autre danseur qui suit. Ainsi c’est le professionnel qui oriente la conversation dans la bonne direction, comme le danseur qui mène la danse. C’est cette posture qui constitue l’esprit de l’entretien motivationnel.

Si vous voulez en savoir plus, je vous invite à consulter cette vidéo, qui contient des exemples de questions, de reformulations, de résumés, de valorisations, etc. que le professionnel peut utiliser dans un entretien motivationnel. Vous y trouverez deux extraits qui illustrent la différence entre un entretien classique et un entretien motivationnel, autour de l’arrêt du tabac.

POUR ALLER PLUS LOIN

J’espère que cet article vous a donné envie de découvrir l’entretien motivationnel, et de l’expérimenter dans votre vie. N’hésitez pas à me laisser vos commentaires, vos questions ou vos témoignages, etc. Je serai ravi de vous répondre et de poursuivre la conversation avec vous. A bientôt!

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Communication Insertion professionnelle Mentorat Psychologie

Comment utiliser la théorie socio-cognitive pour le mentorat?

Les outils pratiques de la théorie socio-cognitive (TSC) permettent aux mentors d’augmenter le sentiment d’efficacité personnelle chez leurs bénéficiaires

Dans un article précédent, nous avons présenté la théorie socio-cognitive (TSC) et son intérêt pour accompagner le changement. Nous avons vu également dans un autre billet comment elle pouvait, en particulier, aider à surmonter la peur de parler en public.

A présent, nous nous intéresserons à la manière de l’employer concrètement, dans le cadre des actions de mentorat. Dans ce premier article, nous donnons les clés pratiques pour utiliser la TSC.

LES QUATRE SOURCES DU SENTIMENT d’efficacité PERSONNELLE

Pour rappel, le sentiment d’efficacité personnelle (SEP) est la pierre angulaire de la TSC : l’augmenter va produire des effets sur l’adoption d’un nouveau comportement et le changement qui en résulte.

Or, Bandura, le créateur de la TSC, affirme que le SEP provient de quatre sources : avoir accompli le comportement souhaité par le passé (expérience de maîtrise), modeler son comportement en observant d’autres personnes réussir une tâche (expérience vicariante), être persuadé que l’on peut accomplir une action (persuasion), et réduire les états affectifs et physiologiques qui gênent le nouveau comportement (gestion des états affectifs et physiologiques).

LES EXPÉRIENCES DE MAITRISE

L’approche la plus directe pour créer une expérience de maîtrise est de pratiquer le nouveau comportement. Par exemple, la posture lors d’un entretien d’embauche ou la prononciation d’un discours, après s’être formé aux compétences nécessaires pour réussir.

De fait, les croyances des individus et leurs actions se renforcent mutuellement. La réussite nourrit la conviction d’être efficace qui va favoriser la réussite ultérieure. Une spirale ascendante s’établit donc entre expérience de maîtrise et efficacité personnelle.

Le tableau suivant résume les techniques qui nourrissent les expériences de maîtrise.

Techniques Exemples
Pratiquer le comportement-cible avec succès Acquérir des compétences, par exemple la formation à l’entretien d’embauche

S’exposer aux situations menaçantes

Expérimenter graduellement Se fixer des cibles intermédiaires de difficulté croissante en vue d’atteindre le comportement visé, par exemple hiérarchiser des situations anxiogènes ou bien augmenter la dose d’exercice physique chaque semaine
Pratiquer l’imagerie mentale Imaginer le succès ou les progrès, simuler le comportement mentalement, visualiser la tâche, par exemple l’exposition volontaire dans le traitement des phobies, ou bien la résistance aux tentations de fumer
Se préparer aux revers Anticiper les conséquences : par exemple violer une abstinence

Attribuer les revers à des causes externes et les réussites à des causes internes (le travail, le mérite)

Auto-surveiller le comportement et ses résultats Suivre le comportement ainsi que les progrès vers l’objectif, par exemple en tenant un journal de l’alimentation ou de la perte de poids
S’appuyer sur des réussites passées Raconter des situations de maîtrise, par exemple des récits autobiographiques de réalisations probantes, pour transférer des stratégies efficaces à de nouveaux comportements.
Adopter un état d’esprit tourné vers l’apprentissage Donner la priorité au développement de nouvelles compétences plutôt qu’à l’évitement ou à la réussite
LES EXPERIENCES VICARIANTES

Observer une personne (“modèle”) effectuer une tâche que l’on désire effectuer et la voir réussir est une expérience vicariante. Celle-ci permet d’instiller la croyance que l’on peut soi-même y arriver. En plus, elle renseigne sur les stratégies et les compétences utiles pour surmonter certains obstacles. On peut d’ailleurs s’observer soi-même (“auto-modélisation”). Plus le modèle surmonte de difficultés et plus il ressemble à l’observateur, plus l’expérience sera utile à l’observateur.

Le tableau suivant résume les techniques pour susciter les expériences vicariantes.

Techniques Exemples
Observer des modèles (réels ou symboliques) Observer des personnes aux caractéristiques proches des siennes effectuer le comportement avec succès : par ex. des modèles réels dans des groupes de soutien, ou des modèles symboliques dans des récits inspirants
S’auto-modeler Produire des témoignages (par ex. en video) de l’exécution réussie par soi-même du comportement, par exemple l’enregistrement vidéo d’une séance d’entraînement à la formation à l’entretien d’embauche
LA PERSUASION VERBALE

La persuasion nous donne l’assurance que d’autres personnes croient en notre capacité à réussir. Elle fournit aussi une validation de nos progrès sur le chemin du changement. De même, l’auto-persuasion s’avère efficace, notamment dans la recherche d’emploi, en recourant par exemple à des mantras.

Cependant la persuasion verbale reste une source d’auto-efficacité moins fiable que les deux précédentes. Elle peut même s’avérer contre-productive. En effet, si un souvenir d’échec a sapé notre capacité à réussir, la persuasion pourrait déclencher au contraire de la résistance.

Le tableau suivant résume les techniques de persuasion verbale :

Techniques Exemples
Recevoir des encouragements de la part de personnes crédibles Véhiculer la croyance que la réussite du comportement est très probable
Exprimer un discours intérieur à caractère pédagogique ou motivationnel Réciter un discours intérieur motivationnel

S’auto-guider verbalement, par exemple en se répétant les étapes du comportement

Identifier les pensées dysfonctionnelles et les transformer en alternatives positives

 

LA gestion des États affectifs et physiologiques

Commencer une tâche difficile, surtout si elle est nouvelle, déclenche de l’appréhension chez la plupart d’entre nous. Elle s’accompagne généralement de symptômes physiologiques ou affectifs (par exemple, une augmentation du rythme cardiaque, de la transpiration). Si nous interprétons la cause de ces signes comme un manque de préparation, ou comme la prédiction d’un échec, ceux-ci peuvent diminuer notre sentiment d’efficacité personnelle et altérer nos performances ultérieures.

Pour Bandura, les expériences de maîtrise, présentées plus haut, en améliorant les compétences d’adaptation, font percevoir l’avenir comme moins menaçant. Ainsi, les pensées anxieuses qui peuvent tout de même survenir, ne submergeront pas l’individu.

Le tableau suivant résume les autres techniques de gestion des états affectifs et physiologiques :

Techniques Exemples
Pratiquer la psycho-éducation Expliquer comment les processus mentaux influent sur les fonctions biologiques: par exemple, les conséquences somatiques et affectives de dramatiser des symptômes corporels anxiogènes, apprendre à interpréter la nervosité comme le signe de que le corps est prêt, corriger les interprétations erronées de symptômes corporels ressentis comme des menaces
Utiliser le biofeedback Démontrer l’association corps-esprit
Identifier et acquérir des capacités d’adaptation (Se) Former à des stratégies d’adaptation, de relaxation ou de gestion du stress afin d’accroître la préparation et de contrôler les états physiologiques et affectifs néfastes avant et pendant l’exécution du comportement
Tester les capacités d’adaptation Collecter des informations permettant de corriger les symptômes physiologiques et affectifs en réalisant des expériences comportementales, par exemple, la maîtrise de la situation redoutée avec le thérapeute lors d’une séance d’exposition systématique
POUR ALLER PLUS LOIN

En conclusion, la TSC permet d’améliorer le SEP du bénéficiaire d’une action de mentorat en agissant sur les 4 sources à l’origine de ce sentiment.

Dans un prochain article, nous présenterons la manière d’employer ces outils face à des situations réelles de mentorat. Nous nous appuierons pour cela sur des exemples tirés de l’insertion professionnelle et de la prise de parole en public.

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Communication Psychologie

Comment surmonter la peur de parler en public grâce à la théorie socio-cognitive?

La théorie socio-cognitive (TSC) permet de meilleures prises de parole en public

Dans un précédent article, nous avons vu que la peur de parler en public était très répandue. Elle pouvait être aussi très handicapante. Dans cet article, nous allons voir comment la TSC permet de surmonter la peur de parler en public.

NOS DOUTES ? DES TRAITRES !

La peur de parler en public est une forme de phobie sociale. A ce propos, le père de la TSC, Albert Bandura a beaucoup étudié les phobies. Pour lui, l’anxiété découle d’un faible croyance en ses capacités à surmonter la peur. Il a baptisé cette croyance sentiment d’efficacité personnelle (SEP). Ainsi, comme l’écrivait William Shakespeare, “nos doutes sont des traitres et nous privent de ce que nous pourrions souvent gagner de bon parce que nous avons peur d’essayer.”

De fait, les chercheurs ont mis en évidence un lien entre SEP et peur de parler. Ainsi des étudiants formés à structurer leur discours et utiliser leur voix ont vu leur anxiété baisser. Au travers de telles formations, les personnes se convainquent de l’amélioration de leurs compétences et augmentent leur SEP.

Plus généralement, dans le traitement des phobies sociales, agir sur le SEP en améliore le résultat. Si, après le traitement, les patients constatent une amélioration de leurs compétences sociales, les situations redoutées leur apparaissent moins menaçantes. D’ailleurs, une intervention manipulant le SEP a montré plus d’effet que l’exposition systématique ou la restructuration cognitive, thérapies traditionnelles pour soigner les phobies sociales.

LE RÔLE FONDAMENTAL DU SENTIMENT D’EFFICACITÉ PERSONNELLE

La synthèse de la littérature sur les phobies sociales permet de mettre en évidence le modèle socio-cognitif de la prise de parole en public :

Pour commencer, le SEP exerce son effet sur la peur de parler en public à travers les attentes de résultats qu’un orateur peut espérer de sa prestation. Ainsi, l’anxiété apparait lorsque les personnes désirent donner une impression particulière sur les autres (le résultat attendu) mais doutent qu’ils en soient capables (le SEP). Et plus le coût de l’échec est élevé, plus l’anxiété est importante.

En outre, les orateurs anxieux émettraient plus fréquemment des doutes sur leur capacité à créer les impressions désirées sur le public et s’attendraient à ce que leur performance soit en-dessous de leurs attentes. Ils auraient également tendance à évaluer les résultats de leurs prises de parole plus négativement que les sujets normaux, et indépendamment du résultat objectif.

SON ACTION SUR LE COMPORTEMENT

Ensuite, le SEP impacte les facultés de la personne à s’auto-gérer. Ce sont par exemple la capacité à s’auto-évaluer, à se fixer des objectifs et à activer des stratégies efficaces. Entre autres, on a montré que les phobiques sociaux ont du mal à définir et à atteindre des objectifs sociaux

Enfin, le SEP influence l’effet de l’environnement externe, comme par exemple faire face à un public hostile. Dans cette situation, le pouls d’un orateur de faible SEP a tendance à accélérer davantage qu’un orateur de forte SEP.

Dans la suite de la chaîne, l’attente de résultats, les facultés d’auto-gestion et la perception de l’environnement conditionnent à leur tour le comportement de l’orateur, en particulier s’il recherchera ou évitera les situations de communication. Un orateur à faible SEP aura tendance à éviter les prises de parole en public. Cette stratégie d’évitement va créer à son tour une boucle de renforcement. Comme une prophétie auto-réalisatrice, l’évitement va convaincre la personne qu’elle n’a pas les compétences adéquates, amoindrissant son SEP et intensifiant l’évitement.

LES BONNES PRATIQUES RÉVÉLÉES PAR LA SCIENCE

Selon les études qui donnent crédit au modèle socio-cognitif de la prise de parole en public évoqué précédemment, un comportement adéquat mène à des résultats probants. Quelles sont donc les bonnes pratiques que la science nous fait découvrir ?

Tout d’abord, entraîner son attention augmente significativement la qualité d’une prise de parole. En effet, l’orateur maitrisant son attention attache moins d’importance aux signaux négatifs externes, issus de l’environnement, ou internes, comme les pensées intrusives. Cela désinhibe sa parole et en améliore la qualité.

De même, lors de la planification d’un discours, la prise en compte explicite des besoins de l’auditoire améliore les performances. D’autre part, répéter son discours, seul ou devant un public, améliore aussi le rendu. En particulier, cela diminue l’anxiété et augmente la propension à communiquer. Enfin, recevoir des évaluations ou s’auto-évaluer est une bonne pratique. De fait, l’absence de retour afaiblirait la confiance des orateurs en leurs propres compétences.

POUR ALLER PLUS LOIN

La TSC paraît adéquate à rendre compte des phénomènes psychologiques à l’œuvre dans la prise de parole en public. L’intérêt de cette théorie est que le SEP, son concept central, est lui-même malléable. Des interventions spécifiques peuvent donc le modifier. En présenter un échantillon sera l’objet d’un prochain article.

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Comment accroître l’utilité de l’entretien motivationnel ?

L’associer à d’autres techniques permet d’en dépasser les limites

Dans un précédent article, nous avons présenté l’entretien motivationnel (EM) comme un outil prometteur dans le domaine du mentorat. A présent, nous nous attacherons à en montrer les limites et les perspectives pour en améliorer l’utilité.

UN SUCCÈS MODÉRÉ

Depuis les années 1980, l’entretien motivationnel a fait l’objet de nombreuses études pour en prouver l’efficacité. Force est de constater que les effets de l’EM sont relativement modestes.

Dans une méta-analyse de 2010 comprenant 119 interventions, des chercheurs ont calculé une faible taille d’effet de l’EM (d=0,22). A titre de repère, le NICE (National Institute for Health and Care Excellence) britannique préconise un seuil de taille d’effet de 0,5 pour qu’un traitement soit significatif sur le plan clinique. D’ailleurs, un quart de ces études n’ont pas eu d’effet ou eu un effet négatif. En outre, les meilleurs résultats provenaient d’essais cliniques de petite taille, donc de qualité médiocre. Enfin, le résultat de certaines études avec de multiples résultats a amélioré artificiellement l’efficacité.

Une autre méta-analyse sur l’abus de substances nocives a mis en évidence que l’effet de l’EM s’évanouissait dans le temps. En effet, la taille d’effet baissait de 0,77 à un mois à 0,11 après 12 mois.

Pourquoi de tels résultats un peu décevants ? Le psychologue Albert Bandura explique, à propos du traitement des addictions, que “[certes] on peut s’efforcer d’augmenter la motivation à démarrer le traitement. Mais si l’engagement du patient à changer ses habitudes est faible ou inexistant, il est préférable de différer le traitement dans le futur quand ses préoccupations seront plus prégnantes. Car l’échec d’efforts mi-chèvre mi-chou ne peut que renforcer la croyance en la futilité de ces efforts pour changer. Il faut que le changement se traduise rapidement pas des résultats positifs car sinon, l’échec va au contraire renforcer le sentiment d’inefficacité”. Autrement dit, l’EM peut se révéler utile pour augmenter temporairement la motivation, mais il faut d’autres relais pour que cette motivation perdure.

L’EM RENFORCE L’ENGAGEMENT DANS LE TRAITEMENT

Il ne faudrait cependant pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Ainsi, lorsque l’EM est conjugué avec une autre approche, il peut contribuer à en améliorer les effets. Prenons l’exemple des thérapies cognitivo–comportementales (TCCs).

Tout d’abord, compléter une TCC avec de l’EM en améliore le résultat. C’est le cas de l’abus d’alcool, de cocaïne, de l’anxiété généralisée et des troubles du comportement chez l’enfant.

Par ailleurs, selon une étude qualitative, les thérapeutes obtenant les meilleurs résultats avec leurs patients ont des caractéristiques communes. Leurs patients sentent qu’ils sont plus à leur écoute et davantage dans la collaboration. Ils les engageent plus activement à suivre leur traitement. Or ce sont là des compétences que développe l’EM, contribuant ainsi à améliorer la relation thérapeutique en la rendant plus humaine.

Enfin, l’EM, en augmentant la motivation et en diminuant l’ambivalence, pourrait augmenter l’adhésion au traitement, comme dans le traitement de la dépression pour effectuer les exercices en dehors des séances. Or, un des inconvénients majeurs des TCC est leur taux important d’attrition et de récidive (environ 50% des sujets abandonnent le traitement ou rechutent).

L’EM peut donc constituer un excellent tandem pour amplifier cette motivation. A ce titre, l’EM peut être utilisé en prétraitement pour augmenter l’engagement du bénéficiaire de commencer le traitement, ou bien en cours de traitement, à chaque fois que la motivation chute.

POUR ALLER PLUS LOIN

Si l’EM n’est pas une panacée, il est de nature à améliorer les traitements auxquels il est adjoint. Dans un prochain article, nous nous intéresserons à un de ces traitement pour le mentorat.

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Comment accompagner le changement avec la théorie socio-cognitive ?

Cette théorie psychologique, née au 20ème siècle, est utile dans les démarches de mentorat

Dans un article précédent, nous avons expliqué l’utilité de l’entretien motivationnel (EM) pour le mentorat. Cependant son efficacité reste limitée, à moins qu’il ne soit associé à une autre technique. Dans cet esprit, nous allons présenter la théorie socio-cognitive (TSC) et montrer en quoi elle pourrait s’appliquer au mentorat.

LA THÉORIE SOCIO-COGNITIVE, QU’EST-CE QUE C’EST ?

Le psychologue canadien Albert Bandura a développé la TSC dans les années 1960, initialement comme une théorie de l’apprentissage. Selon celle-ci, les individus apprennent en observant les comportements des autres en les imitant.

Bandura l’a ensuite enrichie pour en faire une théorie capable de prédire le comportement humain. La TSC postule que les individus sont des agents. Ils sont capables, par leurs propres actions, d’exercer une influence intentionnelle sur leur fonctionnement et sur le cours des événements impactant leur existence.

LA TRIADE DU FONCTIONNEMENT HUMAIN

Pour la TSC, le fonctionnement humain est le produit de l’interaction entre les influences intra-individuelles, du comportement de l’individu et les facteurs liés à l’environnement :

Les déterminants liés à l’individu sont des facteurs internes, tels que les pensées, les sentiments et les croyances. Les déterminants environnementaux sont des événements qui impactent l’individu.

Chacun des déterminants de cette triade interagit réciproquement avec les deux autres. Ainsi un comportement peut influencer les déterminants individuels. Par exemple, lors d’une soirée, un adolescent qui refuse de boire (comportement) pourrait penser : “Mes amis vont me trouver ennuyeux” ou bien “Je pourrai mieux étudier et obtenir une bonne note pour l’examen de lundi”. De même, le comportement peut avoir un impact sur l’environnement. Dans notre exemple, devant son refus de boire, les amis de l’adolescent pourraient faire pression sur lui pour qu’il change d’attitude.

LES DEUX QUESTIONS CLE

Grâce à ces influences réciproques, en particulier sur les facteurs individuels, les individus sont davantage que les produits de leur environnement. Ils peuvent améliorer leurs conditions d’existence.

Pour simplifier à l’extrême, l’individu adopte un comportement après avoir répondu à deux questions. La première est “Est-ce qu’adopter ce changement va modifier ma vie dans un sens positif ?” – en terme technique, on l’appelle l’attente de résultats. La seconde est “Est-ce que je me sens capable d’adopter ce comportement ?” Ce que Bandura baptise le sentiment d’efficacité personnelle (SEP). Si la réponse est oui à ces deux questions, la personne va former l’intention d’adopter le comportement ou se fixer un objectif qui se traduiront par la réalisation du comportement.

LE RÔLE CENTRAL DU SENTIMENT D’EFFICACITÉ PERSONNELLE

Le SEP est central à la théorie car il affecte le comportement directement et indirectement par le biais des autres déterminants : attente de résultats, buts et facteurs environnementaux :

De fait, on a montré que le SEP était le plus fort prédicteur du comportement. De même, le SEP a un effet positif dans plus de 93% des études. Les effets ont d’ailleurs été notés aussi quelles que soient les populations étudiées : enfants (taille d’effet 1,51), adolescents (0,30) adultes étudiants (0,70), adultes non-étudiants (0,66)

le sep est manipulable

L’autre caractéristique intéressante du SEP est que l’individu peut le modifier grâce à 4 moyens. Tout d’abord, en vivant des expériences de maîtrise du comportement-cible (maîtrise guidée). Ensuite, en prenant connaissance d’expériences de maîtrise réalisées par d’autres personnes (modelage). Ou encore, en recevant des encouragements (persuasion sociale). Enfin en contrôlant ses sensations psycho-physiologiques. A ce titre, dans près de 95% des études analysées par les chercheurs, des effets modérés à élevés ont été obtenus du SEP que ce soit par la maîtrise guidée (0,75 de taille d’effet), le modelage (1,02) ou la persuasion verbale (0,40).

POURQUOI EMPLOYER LA SCT EN MENTORAT ?

La théorie socio-cognitive a de nombreuses applications dans différents domaines, notamment l’éducation, la santé, le travail et le sport. En particulier dans deux domaines couverts par le mentorat : la prise de parole devant un public et l’insertion professionnelle.

Par ailleurs, elle dispose d’une communauté nombreuse de chercheurs qui continuent d’approfondir la connaissance. Elle entretient aussi des liens avec l’entretien motivationnel par le biais du SEP. Il a d’ailleurs été montré que l’EM avait un impact positif sur le SEP.

POUR ALLER PLUS LOIN

La théorie socio-cognitive par sa capacité à permettre à l’individu de changer est prometteuse pour le mentorat. Dans un prochain post, nous verrons comment l’utiliser concrètement dans la relation mentor-mentoré.

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Philosophie Politique

Qu’est-ce que la justice ?

Dans sa Théorie de la Justice, le philosophe John Rawls expose trois principes pour concilier liberté et égalité

Qu’est-ce que la justice sociale ? Est-ce l’égalité des chances ? La liberté pour chacun ? La solidarité entre les citoyens d’une même nation ? Le philosophe américain John Rawls a proposé une théorie de la justice qui concilie la liberté, l’égalité et la solidarité.

Aujourd’hui, la France fait face à des défis majeurs: crise sanitaire,  inégalités sociales, revendications identitaires… Dans cet article, nous nous demandons si cette théorie est pertinente pour améliorer la situation actuelle de notre pays. Elle offre des outils conceptuels utiles pour penser la justice dans une démocratie.

Qu’est-ce que la théorie de la justice de Rawls

La philosophie de Rawls se veut rationnelle. Elle prétend ne reposer sur aucun jugement de valeur qui relèverait d’une conception éthique, métaphysique ou religieuse particulière.

Sa théorie de la justice définit les principes qui devraient régir une société juste et démocratique. Pour cela, Rawls imagine une expérience de pensée. Des individus rationnels doivent choisir les règles de base de leur société. Mais ils ne savent pas quelle sera leur place dans celle-ci. Les individus dans cette position originelle sont placés sous un voile d’ignorance. Ils ne connaissent ni leur sexe, ni leur race, ni leur religion, ni leurs talents, ni leurs préférences. Ils ne savent que les caractéristiques générales de la société. Elle se compose d’êtres libres et égaux. Elle doit satisfaire des conditions de rareté et d’incertitude. Enfin, elle est marquée par des conflits d’intérêts et des divergences de conceptions du bien. Cette situation, qu’il appelle la position originelle, doit garantir l’impartialité et l’équité du choix.

les trois principes de justice

Dans ces conditions, Rawls pense que les individus choisiraient trois principes de justice. Le premier principe est celui de la liberté. Chaque personne doit avoir un droit égal au système le plus étendu possible de libertés fondamentales. Il s’agit de la liberté d’expression, de conscience, d’association, etc. Ce système doit être compatible avec un même système pour tous. Ce principe a la priorité absolue sur les deux autres.

Le second principe est celui de l’égalité, réelle et non formelle, des chances : chacun peut accéder à toutes les fonctions et les positions, pourvu qu’il en ait les capacités. Ce principe, à son tour, a priorité sur le dernier.

Le troisième principe, “de différence”, est que les inégalités économiques et sociales ne sont légitimes que dans la mesure où elles contribuent à rendre meilleur possible le sort de ceux qui ont le moins.

En adoptant ces trois principes, on obtient ainsi la situation la plus égalitaire qui ne soit pas rejetée par l’ensemble des parties prenantes. On pourrait être plus égalitariste que Rawls, mais on aurait alors tout le monde contre soi : les plus pauvres, car ce sont les principes de la justice rawlsienne qui maximisent leur sort ; les plus riches, car ils devraient contribuer davantage. D’autre part, ces principes incitent les plus doués à se donner à fond, puisqu’ils recueilleront les fruits de leurs talents ou de leurs efforts. Ces inégalités ne sont que des moyens au service d’une fin morale, qui est la maximisation du sort des plus mal lotis.

prenons un exemple

Illustrons la théorie de Rawls, et plus particulièrement son troisième principe de différence, par la réforme des retraites de 2023. Rappelons tout d’abord que cette réforme avait pour but d’économiser 20 milliards par an d’ici 2030. Avant cette réforme, pour toucher une retraite à plein taux, il fallait deux conditions : avoir l’âge légal de 62 ans et la durée requise de cotisations, qui est de 42 annuités pour ceux nés en 1961.

Supposons que, pour cette réforme, le gouvernement ait eu à choisir la plus juste, au sens de ce principe de Rawls, de deux mesures possibles. La première consistait à augmenter le nombre d’annuités nécessaires pour toucher sa retraite à taux plein de 42 à 44. Dans la seconde proposition, celle mise en œuvre effectivement, l’âge minimum de la retraite reculait de 62 à 64 ans.

l’histoire de Fatima et de Marie-Line

Prenons le cas de Fatima, une femme de ménage qui travaille chez Marie-Line, propriétaire d’une villa luxueuse à Marseille. Toutes deux sont nées en 1961.

Fatima a commencé à travailler à 20 ans. Ce métier fatigant et les horaires souvent extrêmes l’exténuent. Elle aspire à prendre sa retraite dès que possible. Elle aurait pu, avant la réforme, la prendre en 2023, puisqu’elle a ses 42 annuités cette année. Selon la première mesure, qui augmente les annuités, elle devra travailler 2 ans supplémentaires afin de cotiser pour le système de retraite.

Marie-Line a fait des études d’ingénieur et a commencé à travailler à 23 ans. il lui faut attendre 65 ans pour atteindre les 42 annuités. La première mesure se traduira pour elle par une retraite à 67 ans. Elle cotisera donc, comme Fatima, deux ans de plus au système de retraite. Comme Marie-Line contribuera davantage que Fatima au cours de ces deux années, à proportion de son revenu beaucoup plus élevé, une telle mesure aura plutôt tendance à réduire les inégalités.

une mesure injuste

Avec la seconde mesure, du fait du recul de l’âge légal à 64 ans, Fatima devra aussi travailler 2 ans supplémentaires. Pour Marie-Line, en revanche, le recul de l’âge de la retraite à 64 ans n’aura pas d’impact sur elle puisque de toute façon, comme avant la réforme, elle devra travailler jusqu’à 65 ans pour avoir tous ses trimestres. Elle ne cotisera donc pas plus qu’avant la réforme. On voit donc que cette mesure pose, à l’égard du principe de différence, deux problèmes : elle accroît les inégalités par rapport à la première, puisque, dans ce cas, Fatima contribue seule au système de retraite. Et, plus grave, elle n’améliore pas sa situation par rapport à la première mesure.

La première mesure est donc plus juste au sens rawlsien. Pourtant, c’est la seconde qui a été mise en œuvre et suscité, à juste titre sous l’angle de l’équité selon Rawls, l’ire d’une majorité de Français.

Pour rendre plus juste le recul de l’âge de la retraite, il eût fallu inclure une dose supplémentaire de redistribution pour améliorer le sort des plus mal lotis, un bonus pour les carrières longues par exemple.

pour aller plus loin

En conclusion, nous avons vu que la théorie de Rawls offre une vision intéressante et stimulante de la justice. Elle peut permettre de décider entre différentes politiques publiques.

Elle a cependant fait l’objet de critiques venant de deux camps opposés, les libertariens et les communautaristes. C’est ce que nous verrons dans un prochain article.

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Communication Psychologie Toastmasters

La pratique délibérée pour s’améliorer en improvisations

Vous voulez devenir un orateur hors pair ? Entraînez-vous en suivant les conseils d’un psy qui transforme n’importe qui en champion des échecs ou de Toastmasters

Vous avez envie de devenir un meilleur orateur, de captiver votre auditoire, de convaincre avec vos arguments ? Vous savez que pour y arriver, il faut s’entraîner, mais vous ne savez pas comment vous y prendre ? Aujourd’hui, je vais vous parler de la pratique délibérée, une méthode scientifique pour acquérir et améliorer n’importe quelle compétence. Je vais aussi vous montrer comment vous pourrez appliquer ces principes aux improvisations Toastmasters. Ces exercices de prise de parole mettent à l’épreuve votre réactivité, votre créativité et votre éloquence.

Qu’est-ce que la pratique délibérée ?

La pratique délibérée est un concept développé par le psychologue Anders Ericsson. Il est considéré comme le père de la science de l’expertise. Selon lui, la pratique délibérée permet d’atteindre l’excellence, que ce soit en musique, dans les échecs, ou l’art oratoire.

La pratique délibérée se distingue de la simple pratique par plusieurs caractéristiques :

  • Elle se fixe un objectif spécifique et mesurable, qui correspond au niveau de performance souhaité.
  • Elle implique de se confronter à des défis qui dépassent ses capacités actuelles.
  • Elle a besoin d’un retour immédiat et constructif, pour identifier ses erreurs et ses points à améliorer.
  • Elle se focalise sur le processus plutôt que sur le résultat. Elle cherche à comprendre les principes sous-jacents à la compétence visée.
  • Elle repose sur la répétition et la révision régulières, pour consolider les acquis et renforcer la mémoire.
  • Elle s’inspire des meilleurs, en se comparant aux experts du domaine et en s’appropriant leurs méthodes et leurs stratégies.
Comment appliquer la pratique délibérée aux improvisations Toastmasters ?

Les improvisations Toastmasters consistent à répondre à une question inopinée en moins de deux minutes et demie. Les clubs Toastmasters les utilisent pour développer les compétences de communication de leurs membres. Elles sont un excellent terrain d’application pour la pratique délibérée. En effet, elles sollicitent plusieurs domaines de l’art oratoire : la structure, le langage, la voix, le geste…

avoir un objectif et se lancer un defi

Voici comment vous pourriez utiliser les principes précédents de la pratique délibérée pour vous préparer et réussir vos improvisations :

  • Avoir un objectif spécifique et mesurable : avant de vous entraîner aux improvisations, définissez clairement ce que vous souhaitez améliorer. Par exemple, vous pouvez vouloir augmenter la durée de votre prise de parole, réduire votre stress, mieux structurer votre discours ou utiliser un vocabulaire plus riche. Choisissez un objectif qui soit adapté à votre niveau actuel et qui soit quantifiable. Par exemple, vous pouvez mesurer la durée de votre improvisation, le nombre d’hésitations que vous faites ou le nombre d’idées que vous développez.
  • Sortir de sa zone de confort : pour progresser aux improvisations, il faut accepter de se mettre en difficulté. Ne choisissez pas des sujets trop faciles ou trop familiers. Au contraire, exposez-vous à des sujets variés et aléatoires, qui vous obligent à mobiliser vos connaissances générales, votre culture personnelle, votre imagination… Vous pouvez utiliser des applications ou des sites web qui génèrent des sujets de “Table Topics Toastmasters”, ou demander à un ami ou à un membre du club de vous en proposer. Vous trouverez ici une liste de sujets avec tirage aléatoire.
recevoir des retours et comprendre le fonctionnement
  • Obtenir un retour immédiat et constructif : pour savoir si vous avez réussi ou non une improvisation, il faut avoir un retour sur votre performance. Dans les clubs Toastmasters, un évaluateur donne un retour aux participants à la séance d’improvisations. Quand vous vous entraîner en solo, le mieux est de vous filmer ou de vous enregistrer, pour pouvoir analyser ensuite votre discours, votre voix, votre langage corporel… Vous pouvez aussi demander l’avis d’un mentor ou d’un pair expérimenté, qui saura vous donner des conseils personnalisés et des pistes d’amélioration.
  • Se concentrer sur le processus plutôt que sur le résultat : pour maîtriser les improvisations, il faut comprendre comment elles fonctionnent, quels sont les éléments qui les composent et comment les articuler. Il faut aussi être conscient de ses forces et de ses faiblesses, de ses stratégies et de ses réflexes. Au lieu de se focaliser sur le fait de donner une bonne ou une mauvaise réponse, il faut se concentrer sur le fait de développer sa capacité à argumenter, à convaincre ou à faire rire. Il faut aussi apprendre de ses erreurs et de ses succès, en identifiant ce qui a marché ou pas, et comment s’améliorer.
répéter et apprendre des meilleurs
  • Répéter régulièrement : pour ancrer les improvisations dans sa mémoire et dans son répertoire, il faut les pratiquer fréquemment, au moins une fois par semaine, voire tous les jours si possible. Il faut aussi réviser les sujets que l’on a déjà traités, pour renforcer les connaissances acquises et éviter l’oubli. Vous pouvez par exemple relire vos notes, réécouter vos enregistrements ou refaire les mêmes sujets avec des variantes.
  • Chercher à se comparer aux meilleurs improvisateurs: observez comment ils répondent aux sujets, comment ils structurent leur discours, comment ils utilisent leur voix, leur regard, leur geste… Essayez de comprendre ce qui fait leur force, leur originalité, leur impact. Vous pouvez regarder des vidéos de “Table Topics Toastmasters” sur YouTube, ou assister à des concours interclubs.
pour aller plus loin

Les improvisations Toastmasters sont un excellent moyen de développer votre art oratoire. Mais pour en tirer le meilleur parti, il faut les pratiquer avec méthode et rigueur. La pratique délibérée est une approche scientifique qui vous permettra d’atteindre un niveau d’excellence dans cette compétence. En appliquant les principes de la pratique délibérée, vous verrez votre aisance verbale, votre confiance en vous et votre impact sur votre auditoire augmenter considérablement.

Vous voulez rencontrer des improvisateurs expérimentés et participer à une séance d’improvisations lors d’une prochaine réunion ? C’est par ici.

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Communication Toastmasters

Comment créer un nouveau club Toastmasters en s’appuyant sur un club de référence

Appuyer un nouveau club Toastmasters sur un club existant lui permet d’accéder à des ressources et d’accélération son développement

L’épidémie de Covid a fait chuter le nombre de Toastmasters dans le monde. Ainsi, l’Ile-de-France a perdu plus de 30% de ses membres entre 2019 et 2023. Heureusement, certains clubs ont surmonté cette crise en conservant un nombre important d’adhérents. Tel est le cas de l’Etincelle et de SCINTILLE! Ils cumulaient à eux deux 78 membres en 2023, plus de 50% qu’en 2019.

De nombreux visiteurs continuent de faire la queue pour assister aux réunions de ces clubs. Ils créent ainsi une opportunité de former de nouveaux clubs. Dans ce contexte, quels enseignements pourrions-nous déduire de de la création de SCINTILLE ?

les défis d’un nouveau club

Plusieurs clubs créés récemment ont disparu après seulement quelques mois d’existence, comme la plupart des clubs d’entreprise (Oracle, Schlumberger entre autres) et le club de Brest. Il est en effet très difficile de créer un club ex-nihilo, sans bénéficier du soutien d’un club existant.

Un club naissant doit relever deux défis. Tout d’abord, il doit attirer des invités alors qu’il est encore balbutiant. Peu visible sur le web, il n’a pas la réputation pour alimenter le bouche à oreille. De plus, les fondateurs affrontent une charge de travail considérable : animer des réunions, recruter de nouveaux membres, gérer les aspects administratifs et financiers, jusqu’à ce que le club ait suffisamment de membres expérimentés pour prendre le relais.

s’appuyer sur un club de reference

S’appuyer sur un club de référence, comme ce fut le cas pour SCINTILLE! avec Etincelle, présente plusieurs avantages. Le club en création accède au flux d’invités du club de référence, qui peuvent ainsi choisir le club correspondant à leurs préférences (horaires, lieu, ambiance…). En même temps, les membres expérimentés du club de référence servent de coachs aux nouveaux membres. Leur expérience les aide à remplir les rôles les plus complexes d’une séance (animateur, évaluateur général). Cela rend les réunions plus intéressantes et dynamiques.

Pour leur part, les membres du club de référence peuvent bénéficier des séances du nouveau club, pour progresser plus vite dans leurs parcours éducatifs et muscler leurs compétences de leadership. Enfin, les deux clubs mutualisent certains coûts, comme les frais bancaires ou l’achat de matériel (caméra pour filmer, projecteur,…).

Bénéficier de ces avantages impose quelques prérequis. Tout d’abord, le site du club de référence doit être bien visible sur le web, afin d’attirer le maximum d’invités. En particulier, il doit être clair, attrayant et à jour. Il doit également mentionner l’existence du nouveau club et les modalités pour y assister. Ensuite, les membres et le bureau du club de référence doivent explicitement accorder leur soutien au nouveau club. Ils doivent comprendre les bénéfices du projet pour eux-mêmes, afin de consentir à verser les 125 USD nécessaires à la création du nouveau club et fermer temporairement les inscriptions pour donner la priorité au nouveau club. Prononcer un discours de présentation du projet ou organiser un concours pour trouver un nom au nouveau club sont des façons d’entraîner cette adhésion.

Avoir une équipe de création solide

L’un des derniers clubs créés au sein de la division A, celui de Brest, a disparu un an après sa création. Entre autres raisons, son (unique) fondateur avait quitté le club au lendemain de son inauguration. Pour éviter cela, il est indispensable qu’un minimum de trois membres expérimentés issus du club de référence forme l’équipe de création du nouveau club. Ces membres assurent les rôles clés de président, vice-président formation et vice-président relations publiques.

Avec une telle équipe, il est possible de répartir la charge de travail entre les fondateurs et d’éviter l’épuisement. A mesure que les nouveaux membres adhèrent, certains, particulièrement motivés, rejoindront le bureau, favorisant ainsi la transmission des savoir-faire et la cohésion du groupe.

Les fondateurs bénéficient, de leur côté, d’une opportunité d’obtenir les crédits de sponsoring de club nécessaires au titre de DTM.

Créer la même expérience que dans un club mature

Pour fidéliser les membres du nouveau club, plusieurs initiatives concourent à leur faire vivre la même expérience que dans un club mature.

Lors de la création de SCINTILLE !, les nouveaux membres disposaient d’un document leur permettant d’effectuer tous les projets du niveau 1 de Pathways alors qu’ils n’avaient pas encore accès à Base Camp, la plateforme éducative de Toastmasters. Une fois le club eût été officiellement créé, le bureau du club les assista pour transférer leurs projets dans Base Camp. Ils pouvaient ainsi poursuivre leur parcours sans perdre le bénéfice de leur travail préalable.

De même, les membres du club de référence tenaient les rôles seniors d’une réunion (animateur, évaluateur général, chronométreur…). Progressivement ils laissaient la main aux membres du nouveau club, en les coachant et en les évaluant.

De fait, les nouveaux Toastmasters avaient le sentiment d’appartenir à un club à part entière. Ils acceptaient alors plus facilement de payer une cotisation du même montant que dans le club de référence.

Assurer la pérennité du nouveau club

Une fois que le nouveau club a atteint le nombre minimum de 20 membres pour être officialisé, il faut veiller à en assurer la pérennité. Il doit acquérir progressivement une identité propre, en choisissant une nouvelle salle, une nouvelle identité, une nouvelle devise, etc. Il doit aussi constituer une nouvelle association, avec ses propres statuts, son propre règlement intérieur, son propre compte bancaire, etc.

Disposer d’un site web indépendant, avec un nom de domaine en propre, permet de présenter le nouveau club et ses spécificités.

Pour assurer la viabilité du nouveau club, les adhérents doivent acquérir de l’expérience et renouveler leur adhésion. De la sorte ils pourront à leur tour tenir tous les rôles d’une réunion et coacher les nouveaux arrivants. Pour cela, il faut des réunions variées, des événements conviviaux et des formations complémentaires.

pour aller plus loin

Fonder un nouveau club Toastmasters est une expérience enrichissante et gratifiante. Elle permet aux membres motivés de développer leurs compétences de leadership et de progresser vers le titre de DTM.

SCINTILLE! est un exemple réussi de création d’un nouveau club en s’appuyant sur un club de référence, l’Etincelle en l’occurrence. Si vous voulez en savoir plus sur ces deux clubs dynamiques et innovants, venez assister à l’une de leurs prochaines réunions. C’est ici.